De nouveaux outils pour lutter contre le cybersquatting sur les noms de domaine en au Vietnam

 

vietnamLe 8 juin 2016, au Vietnam, le Ministère de l’Information et de la Communication et le Ministère des Sciences et Technologies ont conjointement pris une circulaire concernant  la récupération des noms de domaine avec le ccTLD <.vn> qui ne respectent pas la Loi Vietnamienne sur la Propriété Intellectuelle de 2005.

Mais si la circulaire introduit plusieurs procédures administratives pour régler les litiges sur les noms de domaine, elle a tout de même omis plusieurs points de contentieux importants et en particulier ceux concernant le cybersquatting et le typosquatting.

Le point sur la législation vietnamienne en matière de droits de propriété intellectuelle

Au Vietnam, deux lois sont importantes pour les droits de propriété intellectuelle et les noms de domaine en <.vn> : la Loi sur la Propriété Intellectuelle de 2005 et la Loi sur la Technologie informatique de 2006. Cette dernière loi règlemente les litiges concernant les noms de domaine en proposant quatre types de procédures (article 76 de la circulaire) : la négociation, la conciliation, l’arbitrage et le contentieux, devant les cours compétentes pour chacune des procédures.

La Loi sur la Propriété Intellectuelle ajoute que le règlement des litiges peut s’effectuer à travers des procédures administratives devant le Ministère de l’Information et de la Communication ou le Ministère des Sciences et Technologies. Ces procédures sont plus rapides, moins coûteuses qu’une action judiciaire et elles permettent à un propriétaire de droits de propriété intellectuelle de demander l’annulation ou le transfert du nom de domaine litigieux.

Pour autant, le « VNNIC » (Vietnam Internet Network Information Center), de son côté, se fonde sur la Loi sur la Technologie informatique qui ne reconnaît pas l’annulation ou le transfert d’un nom de domaine et qui préconise un règlement des litiges par le biais des cours de justice ou d’arbitrage, et non pas via des procédures administratives.

Cette différence de législation est un challenge pour les propriétaires de droits de propriété intellectuelle qui souhaitent faire valoir leurs droits.

Cela explique la nouvelle circulaire des Ministères vietnamiens.

Des nouveautés bienvenues dans la Loi Vietnamienne sur la Propriété Intellectuelle

La circulaire du 8 juin 2016 comporte des mesures positives pour les propriétaires de droits de propriété intellectuelle.

En effet, des dates butoirs ont été introduites pour forcer les contrevenants à stopper leurs activités litigieuses et transférer les noms de domaine à leur propriétaire légitime. En outre, si cette date butoir n’est pas respectée, les autorités administratives peuvent dorénavant prendre des mesures contre ces mêmes contrevenants qui auraient refusé d’obtempérer.

Ainsi, avec ces procédures administratives, il sera possible de demander la suppression du contenu du site internet lié au nom de domaine litigieux. Selon l’article 8 de la circulaire, le contrevenant devra répondre à l’injonction dans un délai de trente jours ouvrable à compter de la décision administrative et supprimer le contenu en question. Il est également possible de demander le transfert du nom de domaine vers son propriétaire légitime, toujours dans un délai de trente jours (article 9).

Enfin, si le délai n’a pas été respecté, les Ministères compétents pourront envoyer une requête au VNNIC afin que le nom de domaine en question soit transféré au propriétaire légal.

Néanmoins, si ces avancées ont été saluées, elles ne sont pas suffisantes puisque les conditions pour y accéder sont trop restrictives. Ainsi, selon l’article 7 de la circulaire, pour demander le transfert d’un nom de domaine, il est nécessaire d’avoir :

  • un nom de domaine identique ou similaire à un droit de marque entrainant des risques de confusion auprès des internautes ;
  • ce nom de domaine litigieux doit être associé à un site internet qui contient des données contrefaisantes ;
  • enfin, ce nom de domaine doit pointer vers un contenu contrefaisant.

Ces données et contenus contrefaisants incluent :

  • les publicités, les lancements de nouveaux produits et les offres de biens et services identiques ou similaires entrainant un risque de confusion et détériorant la réputation et les affaires du propriétaire des droits ;
  • les informations calomnieuses et diffamatoires envers les biens et services du propriétaire légitime.

Cette nouvelle circulaire n’a pas été assez loin dans la règlementation des litiges impliquant des noms de domaine contrefaisants et c’est à regretter. Elle constitue toutefois une avancée dans la lutte contre le cybersquatting en « .vn ».

L’oubli des Cybersquatting et Typosquatting par la nouvelle circulaire

Effectivement, le défaut de cette circulaire du 8 juin 2016 est qu’elle n’inclut pas, dans les conditions nécessaires pour demander une procédure administrative, les litiges impliquant du cybersquatting ou du typosquatting.

Pour rappel, le cybersquatting correspond à la situation dans laquelle une personne a consciemment enregistré de mauvaise foi un nom de domaine identique ou similaire au nom d’une société, à ses produits et services ou à ses marques dans le but de lui revendre par la suite le nom de domaine à un prix excessif. Quant au typosquatting, il s’agit d’erreurs de frappes, de fautes d’orthographe, d’erreurs typographiques volontaires pour qu’un nom de domaine soit semblable au nom d’une société ou à sa marque.

Que ce soit pour le cybersquatting ou le typosquatting, le contrevenant ne crée pas systématiquement un site internet complet avec des informations contrefaisantes. En conséquence, la condition de la nouvelle circulaire vietnamienne d’un nom de domaine pointant vers un site internet contrefaisant n’est pas remplie. De ce fait, il n’est pas possible pour le propriétaire de droits de propriété intellectuelle de profiter des procédures administratives dans ces cas précis.

Il ne leur est pas non plus possible de passer par une procédure UDRP puisque le <.vn> n’est pas dans la liste des ccTLDs concernés par la procédure (contrairement au <.com> ou au <.fr>).

Par conséquent, les propriétaires de droits de propriété intellectuelle ne pourront pas se prévaloir de la Loi sur la propriété intellectuelle. Ils devront alors obligatoirement se fonder sur la Loi sur la Technologie informatique et donc passer par une procédure judiciaire devant une cour civile ou par une procédure d’arbitrage ou de conciliation. C’est ainsi que les cours civiles devront régler des litiges moins importants et moins complexes que les autorités administratives.

Il aurait été souhaitable que cette circulaire aille plus loin et se rapproche de la procédure UDRP en intégrant le cybersquatting et le typosquatting dans les procédures administratives. Face aux nombreuses contestations, peut-être les ministères vietnamiens prendront-ils de nouvelles mesures adéquates pour régler les litiges sur le cybersquatting et le typosquatting.

L’affaire est donc à suivre…