Le Trademark Trial and Appeal Board (TTAB), la division du contentieux au sein de l’Office des marques américain (USPTO), a rendu le 8 avril 2009 une décision[1] particulièrement intéressante pour les entreprises qui souhaitent protéger leur marque aux États-Unis.
Honda s’est opposé à la protection aux États-Unis de la marque « V.I.C.» par Winkelmann pour des véhicules de transport et des pièces détachées en classe 12, soutenant que la condition d’intention d’usage n’était pas satisfaite. En effet, lors de l’enregistrement d’une marque aux États-Unis, il est nécessaire d’apporter la preuve soit de l’usage de la marque précédant le dépôt soit de l’intention d’usage (bona fide intent to use)[2].
Sommé de produire des documents concernant son activité, sa stratégie et ses accords commerciaux, Winkelmann a répondu qu’il n’avait pas exploité sa marque aux États-Unis et qu’il n’avait pas réalisé de démarche en vue de le faire. Il a néanmoins produit des documents détaillant son site Internet allemand et l’enregistrement de sa marque dans divers pays. Le TTAB a considéré que, ce faisant, il n’avait démontré ni l’usage de sa marque, ni l’intention d’usage, les documents qu’il avait produit n’étant parfois même pas traduits en anglais.
Cette décision vient conforter la jurisprudence antérieure du TTAB selon laquelle il est réputé ne pas y avoir d’intention d’usage au moment du dépôt dès lors que le titulaire de la marque ne peut pas produire de document prouvant le contraire[3]. La décision Honda Motor Co., Ltd v. Friedrich Winkelmann a en outre le mérite de préciser que les preuves de l’intention d’usage peuvent être différentes selon les cas, et qu’elles doivent porter sur l’ensemble des produits concernés et non sur une partie seulement.
Sachant que l’enregistrement d’une marque peut être contesté pendant 5 ans pour défaut d’usage et qu’il n’est pas possible de pallier à l’absence de preuves montrant l’intention d’exploiter de façon rétroactive, cet arrêt vient fortement limiter l’opportunité du dépôt de marques de défense. Il oblige également les entreprises à documenter de façon exhaustive leur intention d’exploiter aux États-Unis l’ensemble des produits qu’ils entendent protéger.
Si l’on se fie au moteur de recherche de l’USPTO, plus des deux tiers des enregistrements de marques aux États-Unis reposent sur l’intention d’usage. Une telle décision risque donc d’inciter la multiplication de procédures envers les déposants indélicats.
[1] http://www.jurisdiction.com/Honda%20v%20Winkelmann.pdf
[2] Langham Act § 44©, 15 U.S.C. 1126(c).
[3] Commodore Elec. Ltd. V. CBM Kabushiki Kaisha 26 USPQ 1503 (TTAB 1993)