Incertitudes sur le contentieux des noms de domaine en .fr et .re à compter du 15 avril 2011

Suite à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel l’article L45 du code des postes et communications électroniques à compter du 1er juillet 2011. Le législateur s’est alors remis au travail et une nouvelle loi a été promulguée le 22 mars 2011 qui doit entrer en vigueur le 30 juin 2011, une fois le décret en Conseil d’état publié.

La nouvelle loi introduit des changements majeurs dans les règles d’enregistrement des noms de domaine et dans la gestion des litiges. Ces changements vont avoir des conséquences non négligeables pour les titulaires de droits dans les jours qui viennent. En effet, l’AFNIC, office d’enregistrement des noms de domaine en .fr et .re, a publié un communiqué de presse en date du 11 avril annonçant la suspension de la procédure PARL par l’OMPI dès le 15 avril 2011, et de la procédure PREDEC (par l’AFNIC) à compter du 15 mai 2011.

L’AFNIC justifie cette mesure « par les délais afférents à chaque procédure, aucune décision ne pouvant être rendue après l’échéance du 30 juin ». Cette mesure découle de la décision du Conseil constitutionnel (n°2010-45 QPC du 6 octobre 2010) qui organise la phase transitoire jusqu’au 30 juin 2011 et assure la sécurité juridique des décisions prises sous l’ancienne loi.

Quels sont aujourd’hui les recours pour les titulaires de droits en cas de réservation abusive (cybersquatting) ?

A compter du 15 avril pour les situations de cybersquatting et du 15 mai pour les noms de domaine entrant dans le champs de la procédure PREDEC (Procédure de résolution des cas de violations manifestes des dispositions du décret du 6 février 2007), les titulaires de droits n’auront d’autre possibilité que de porter les litiges devant les tribunaux  ou de les soumettre à une procédure de médiation assurée par le CMAP.

Si cette dernière solution est excellente pour résoudre des conflits entre parties de bonne foi, elle est totalement inopérante dans le cas d’enregistrements abusifs, la procédure de médiation n’étant pas une solution contraignante.

Les procédures judiciaires sont efficaces, mais d’une durée incompatible avec le monde si changeant de l’Internet. En effet, dans un arrêt du 9 juin 2009, la Cour de cassation dans une affaire André D. / Sunshine, Afnic avait précisé que le juge des référés ne pouvait prononcer le transfert d’un nom de domaine, ce transfert ne constituant ni une mesure conservatoire, ni une mesure de remise en état. Les titulaires de droits n’auront donc comme unique moyen d’action que le recours au juge du fond.

Enfin, toujours dans la même affaire, la Cour de cassation avait indiqué que la loi (devenue inconstitutionnelle) n’avait pas de portée rétroactive et ne pouvait « remettre en cause la validité d’une situation régulièrement constituée » antérieurement.

Ainsi s’ouvre une période d’incertitude pour les titulaires de droits pour les mois à venir. En effet, si l’ancienne loi est valide jusqu’au 30 juin 2011 quant à l’enregistrement de noms de domaine, l’arrêt des procédures extrajudiciaires retire aux titulaires de droits un outil souple, rapide et efficace en matière de cybersquatting, les procédures judiciaires étant bien plus longues et coûteuses. Une nouvelle procédure devrait être mise en place conformément à la nouvelle loi, mais celle-ci ne sera applicable au plus tôt que le 1er juillet 2011.