Quand la loi Toubon donne des idées aux Québécois

Symbole copyrightDatant de 1994, la loi Toubon est l’une des lois les plus connues en France. Elle impose aux entreprises la traduction en français de leurs slogans, mentions ou informations sur tous les supports destinés au public. La principale exception à cette règle réside dans le droit de marque, puisque les marques en langue étrangère n’ont pas à être traduites.

 

La loi Toubon semble avoir suscité l’intérêt de l’Office québécois de la langue française. Déjà en 2012, cet office avait rédigé une Charte pour l’usage de la langue française à destination des commerçants et avait lancé une campagne publique pour l’utilisation du français sur les devantures des magasins.

 

A l’instar de la loi Toubon la Charte prévoit une exception basée sur le droit de marque. Pourtant l’office refuse de la voir appliquer. Il considère que les enseignes sur les devantures des commerces sont comprises par le public comme des noms commerciaux et non comme des marques. Par conséquent, les enseignes commerciales devraient être traduites en français selon l’Office. Il y a donc une contradiction claire entre la loi et l’interprétation de l’office québécois.

 

C’est dans ce contexte que la Cour supérieure du Québec a été saisie par huit détaillants de l’interprétation de la Charte. La question posée à la Cour est donc sans ambiguïté : soit l’enseigne est une marque reconnue au sens du Trademark Act canadien et l’exception s’applique, soit elle ne l’est pas, et alors une traduction en français s’impose.

 

Dans un jugement déclaratoire en date du 9 avril 2014, les juges de la Cour supérieure du Québec ont considéré que « les marques sont une notion juridique à part entière, gouvernées par leurs règles propres, et qui diffèrent significativement de celles applicables aux noms commerciaux ou aux dénominations sociales ».

 

Le juge n’a donc pris aucune liberté par rapport à la lettre de la loi, et a considéré que les marques affichées en devanture de commerces n’avaient pas à être traduites.

 

S’il est vrai que le Québec est, par tradition, particulièrement attaché à la langue française, cette décision apparait pertinente car la tradition ne doit pas supplanter la loi.