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27 septembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/12348

Dans une décision datant du 27 septembre 2023, la Cour d’Appel de Paris a confirmé une règle cruciale concernant le droit d’auteur dans le domaine du design d’intérieur et des arts appliqués. Au cœur de l’affaire se trouvait la lampe « Lyre », une création unique du sculpteur Philippe Cuny, qui a déclenché une bataille juridique contre l’architecte Carlo Rampazzi pour violation de droit d’auteur.

La reproduction de la lampe « Lyre »

 

Dans cette affaire, Carlo Rampazzi, un architecte d’intérieur, avait commandé la création de plusieurs modèles d’une lampe « Lyre » à Philippe Cuny, sculpteur spécialisé dans les miroirs et les luminaires.

L’architecte Carlo Rampazzi a ensuite publié sur les réseaux sociaux des photographies de la lampe « Lyre » sans obtenir d’autorisation préalable de l’auteur et sans mention de son nom.

Le créateur, Philippe Cuny a donc assigné l’architecte devant le Tribunal Judiciaire de Paris pour contrefaçon de droits d’auteur.

En mai 2021, le Tribunal Judiciaire de Paris a statué en faveur de M. Cuny, créateur de la lampe, condamnant M. Rampazzi pour contrefaçon de droits d’auteur. Ce dernier a ensuite fait appel de la décision devant la Cour d’appel de Paris.

Le 27 septembre 2023, la Cour d’appel de paris a confirmé la décision des juges du fond.

Les juges d’appel rappelle  que le cumul de protection entre le droit des dessins & modèles et le droit d’auteur est possible, dès lors que les conditions des deux droits est rapportée. Ils confirment également la position constante de la jurisprudence sur la théorie de l’accessoire, exceptio au droit d’auteur si deux conditions sont réunies l’œuvre doit être présentée en arrière-plan, ne constituant donc pas un sujet principal et  l’exploitation de l’œuvre doit être involontaire.

 

Décrypter l’Originalité : La Lampe « Lyre » sous l’angle juridique

La Cour a d’abord examiné la question de savoir si la lampe « Lyre » était protégée par le droit d’auteur. Elle rappelle que toute œuvre d’art appliquée doit être reconnue originale pour être protégée par le droit d’auteur. L’originalité, distincte de la nouveauté, est la manifestation des capacités créatrices de l’auteur, reflétant l’empreinte de sa personnalité, qui effectue des « choix libres et créatifs ». La protection du droit d’auteur ne sera refusée pour un design que si la forme est exclusivement dictée par la fonction du produit.

Sur le critère d’originalité, la Cour d’appel conclut que la lampe « Lyre » satisfaisait aux critères d’originalité en raison de sa forme en harpe asymétrique, son aspect aérien et sensuel et sa capacité à évoquer différentes images et émotions. De plus, la Cour relève que Philippe Cuny avait réussi à concilier les contraintes techniques d’une lampe avec une représentation très personnelle, ce qui témoignait de l’originalité de son travail.

 

L’exclusion de la théorie de l’accessoire

Pour échapper à une condamnation en contrefaçon sur la base d’une exploitation sans autorisation (atteinte au droit de reproduction de l’auteur) et sans mention du nom de l’auteur (atteinte au droit de paternité de l’auteur), l’architecte Carlo Rampazzi a invoqué l’exception de la théorie de l’accessoire.

Cette limitation au droit d’auteur trouve son fondement dans la Directive Européenne du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information.

Une jurisprudence constante estime que l’exception dite aussi d’inclusion fortuite, trouve son application lorsque deux conditions cumulatives sont respectées : l’œuvre doit être présentée en arrière-plan, sans être le sujet principal et l’exploitation de l’œuvre doit être involontaire.

En examinant les photographies litigieuses, la Cour d’appel conclut que la lampe « Lyre » était délibérément mise en avant et non accidentelle, ce qui excluait l’application de cette exception. Dans l’une des photographies, la lampe était placée au premier plan avec une mise en scène mettant en évidence l’objet, tandis que dans une autre, bien que située en arrière-plan, elle était toujours très visible dans toutes ses caractéristiques et importante dans la composition de la scène. La Cour d’appel précise qu’en l’espèce, il importe peu que les lampes aient été modifiées et qu’elles ne soient « ni l’objet, ni l’objectif de la communication ».

La théorie de l’accessoire ne peut donc valablement être retenue dans la présente affaire. 

Conclusion : Un précédent pour la protection et le respect dans le design

 

La décision de la Cour d’Appel de Paris a non seulement validé les droits de Philippe Cuny, mais a également établi un précédent solide pour le respect de la propriété intellectuelle dans les secteurs du design et de l’architecture.