La décision de l’INPI du 13 septembre 2024 dans l’affaire NL 23-0183 aborde la question cruciale de la mauvaise foi en droit des marques. L’annulation de la marque « POMPON », déposée dans le but de monopoliser un nom associé au célèbre sculpteur François Pompon, illustre l’abus des droits de propriété intellectuelle pour un avantage commercial indu. Cet article analyse le raisonnement juridique, les preuves et les implications de cette décision pour les entreprises opérant dans les secteurs de la propriété intellectuelle et du patrimoine culturel.

Résumé de l’affaire

Contexte

La marque « POMPON », déposée par un exploitant de boutiques de musées, a fait l’objet d’une procédure d’annulation initiée par la société Dixit Arte SAS. Cette dernière a soutenu que l’enregistrement visait à monopoliser le nom « Pompon », associé au sculpteur François Pompon, dont les œuvres appartiennent au domaine public.

Arguments clés

Au cœur de l’affaire se trouvaient des allégations de mauvaise foi. La partie demanderesse a affirmé que le titulaire de la marque cherchait à exploiter le statut de domaine public du nom de François Pompon en imposant des redevances aux autres utilisateurs légitimes. Cette démarche était perçue comme une tentative d’obtenir un contrôle indu sur un nom qui devrait rester accessible à tous les acteurs du secteur artistique et patrimonial. Le déposant a répondu que la marque avait été enregistrée pour protéger l’intégrité de l’héritage de Pompon et garantir des reproductions de haute qualité.

Analyse juridique

Établir la mauvaise foi

L’INPI a fondé sa décision sur l’article L.714-3 du Code de la propriété intellectuelle, qui permet l’annulation des marques déposées de mauvaise foi. Cette analyse exige une évaluation complète de l’intention du déposant au moment du dépôt, conformément à la jurisprudence européenne. Des éléments tels que la connaissance d’utilisations antérieures par des tiers et le contexte général de l’enregistrement sont déterminants pour établir la mauvaise foi.

Rôle des preuves pour démontrer l’intention

Les éléments décisifs incluaient l’activité du déposant en tant que gestionnaire de boutiques de musées à Dijon, ce qui lui donnait un accès direct aux produits de Dixit Arte. De plus, des courriers électroniques proposant des licences payantes ont renforcé l’affirmation selon laquelle l’enregistrement visait délibérément à monétiser un nom essentiel au domaine public. L’argument du déposant concernant la protection de l’héritage de l’artiste a été jugé peu crédible au vu des motivations financières mises en évidence par les preuves.

Décision et implications

Annulation de la marque

L’INPI a conclu que la marque « POMPON » avait été déposée dans l’intention de créer un monopole indu sur un nom appartenant au domaine public. En restreignant l’accès à un terme essentiel à la reproduction et à la vente des œuvres de François Pompon, le déposant a exploité le système de marques de manière contraire à son objectif.

Implications pour les futures demandes de marque

Cette décision souligne la nécessité d’assurer la bonne foi dans les demandes de marque, notamment dans les cas impliquant des éléments du domaine public. Les entreprises doivent faire preuve de diligence raisonnable pour garantir que leurs dépôts respectent les principes d’équité et n’entravent pas les pratiques commerciales légitimes. Ce jugement met également en lumière l’importance de préserver l’accès aux symboles du patrimoine culturel pour tous les acteurs.

Leçons générales de la décision

La protection du domaine public

La décision souligne que les noms liés aux œuvres du domaine public, tels que ceux de François Pompon, doivent rester librement accessibles aux parties prenantes. Les tentatives d’imposer une exclusivité par le biais de l’enregistrement de marques risquent de contrevenir aux principes du droit de la propriété intellectuelle.

Pratiques éthiques en matière de licences

Cette affaire rappelle l’importance de la transparence et de l’équité dans les accords de licence. L’utilisation des marques pour percevoir des redevances sur des noms du domaine public va à l’encontre de l’esprit de la libre concurrence et de l’innovation.

Conclusion

L’annulation de la marque « POMPON » par l’INPI établit un précédent contre les dépôts de mauvaise foi, mettant en avant la nécessité de pratiques éthiques en matière de gestion des droits de propriété intellectuelle. Les entreprises doivent aligner leurs stratégies de marque sur les principes d’équité et de concurrence.

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FAQ

Quelles sont les conséquences d’un dépôt de marque ?

Le dépôt d’une marque confère à son titulaire un monopole d’exploitation sur le signe pour les produits et services désignés, lui permettant d’agir contre toute utilisation non autorisée. Il s’agit d’un droit exclusif qui peut être opposé aux tiers, sous réserve des droits antérieurs et des exigences de validité de la marque.

Comment s’opposer à un dépôt de marque ?

Il est possible de s’opposer à un dépôt de marque en introduisant une opposition devant l’INPI (ou d’autres offices compétents) dans un délai déterminé après la publication de la demande. L’opposition doit être fondée sur des droits antérieurs, tels qu’une marque déjà enregistrée, une dénomination sociale, ou une indication géographique.

Quels sont les motifs qui permettent de demander la nullité de la marque ?

Une marque peut être annulée pour plusieurs raisons, notamment :

  • L’absence de distinctivité : si le signe est descriptif ou générique.
  • La mauvaise foi : si la demande a été déposée avec l’intention de nuire ou d’entraver les droits d’un tiers.
  • L’atteinte à des droits antérieurs : si elle porte atteinte à une marque préexistante ou à un autre droit protégé.
  • Le non-respect de l’ordre public et des bonnes mœurs : si la marque est contraire aux principes juridiques fondamentaux.

Qu’est-ce que la déchéance de la marque ?

La déchéance d’une marque signifie la perte de ses droits en raison de son non-usage pendant une période continue de cinq ans. Un tiers peut engager une action en déchéance pour libérer l’usage du signe concerné.

Quelles sont les 4 conditions auxquelles doit répondre une marque ?

Pour être valide, une marque doit remplir les conditions suivantes :

  1. Distinctivité : elle ne doit pas être générique ou descriptive.
  2. Disponibilité : elle ne doit pas porter atteinte aux droits d’un tiers.
  3. Licéité : elle ne doit pas être contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs.
  4. Non-trompeuse : elle ne doit pas induire le public en erreur sur la nature, la qualité ou la provenance des produits ou services.

Comment s’opposer à une marque ?

L’opposition à une marque s’effectue en déposant une requête motivée auprès de l’INPI ou d’un autre office compétent. L’opposition doit être fondée sur des droits antérieurs et démontrer que l’enregistrement de la nouvelle marque créerait un risque de confusion pour le public.