Dreyfus

Les charognards du web

Le dicton voulant que le malheur des uns fasse le bonheur des autres trouve une incarnation totale et inégalée sur Internet. Jadis une catastrophe aussi grande soit elle avait des répercussions limitées et touchait des cercles de personnes identifiables. A ce titre, les cybersquatteurs ont révolutionné l’adage en étant à l’affût du moindre souffle leur permettant d’enregistrer un nom de domaine. En soi, il n’y a rien de neuf. L’on connaissait des hommes politiques imprudents livrant leurs slogans de campagne à la télévision en direct pour le plus grand plaisir des cybersquatteurs.

Dans un autre registre, la catastrophe aérienne du vol Air France 447 entre Rio et Paris le 1er juin 2009 a donné lieu à sa panoplie de réservations de noms de domaines. Que ce soit air-france-crash.com, airfrancecrash dans toutes ses extensions génériques, af447.com ou encore aifrancecrash.com en version typosquattée, tous ces noms ont fait l’objet de réservations dans les minutes suivant l’annonce du crash. Et encore cela ne représente certainement que la partie émergée de l’iceberg, tant il existe de variantes possibles sur une actualité aussi dramatique.

De tels actes sont moralement condamnables sur deux plans : d’une part un drame humain permet à n’importe quel individu d’enregistrer un nom et d’espérer ainsi en tirer une rémunération, d’autre part il s’agit dans bien des cas d’atteintes à une marque, en l’occurrence la compagnie aérienne Air France. Si des associations de victimes ou de proches pourraient avoir un intérêt légitime à enregistrer de tels noms, il n’en est pas de même pour des cybersquatteurs. Une telle attitude est également juridiquement condamnable et cela au titre de l’atteinte à une marque. Liberté d’expression et cybersquatting sont des concepts résolument antinomiques, à plus forte raison lorsqu’il s’agit de drames humains.

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Le .tel, nouvel annuaire pour cybersquatteurs

Dans l’univers des extensions génériques, le .tel fait figure de cas particulier. Cette extension se présente comme un annuaire universel standardisé. Un nom en .tel pointe vers une page contenant un nom, des coordonnées et des informations de contact. On dénombre quelques 200 000 noms enregistrés sous cette extension.

Outre que le contenu des sites en .tel est préformaté, son accès était jusqu’au 3 février 2009 restreint. Le .tel se présentait alors comme un modèle d’extension fermée et dédiée à un but précis. La longue période de sunrise mise en place devait permettre d’éviter tout problème lié à des problématiques de marques et de cybersquatting. A l’heure où l’ICANN planche sur ses projets de nouvelles extensions génériques, l’évolution du .tel est pour le moins intéressante.

page dreyfus.tel

Cependant le 14 août 2009, Telnic qui gère l’extension a annoncé que des solutions permettant aux réservataires de monétiser leurs noms allaient être proposées bientôt. Il deviendrait donc possible d’afficher des liens commerciaux ou de parquer son .tel. Est-ce pour pallier à la faible utilité de cette extension ou créer un appel d’air en faveur des cybersquatteurs ? Les deux options sont plausibles étant donné que la monétisation est le fond de commerce du cybersquatting. En espérant que cette dissonance ne soit pas annonciatrice d’autres surprises pour les prochaines extensions génériques.

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