Introduction

L’affaire Max&Co illustre l’importance croissante de la réputation d’une marque dans le cadre des oppositions devant l’Office européen de la propriété intellectuelle (EUIPO), même lorsque les produits ou services en question sont fondamentalement dissimilaires. La Division de l’Opposition de l’EUIPO a clarifié les conditions dans lesquelles une marque de renommée dans le secteur de la mode peut protéger son image contre un usage commercial sur des services totalement distincts, ici dans le secteur du transport.

L’affaire Max&Co : opposition pour des services de transport

Le 15 mai 2024, Max Mara Fashion Group S.r.L., titulaire de la marque antérieure « Max&Co » pour désigner des vêtements et sacs (classes 18 et 25), a formé opposition contre la demande de marque de l’UE « marque » désignant des services de transport (classe 39).

L’opposition reposait sur l’article 8(5) du Règlement sur la marque de l’UE (EUTMR), qui permet d’invoquer la réputation de la marque antérieure afin d’empêcher qu’un tiers tire un avantage indu ou cause un préjudice au caractère distinctif ou à la renommée de celle-ci.

La réputation de la marque comme critère déterminant

Afin de démontrer la réputation de la marque Max&Co, l’opposant a soumis un ensemble probant de documentations, comprenant :

  • Des attestations officielles sur le chiffre d’affaires, les dépenses publicitaires et le réseau de distribution ;
  • Des articles de presse et des extraits de magazines spécialisés renommés (Cosmopolitan, Elle, Vanity Fair, Vogue) ;
  • Des jugements de tribunaux italiens et des décisions de l’Office italien des brevets et des marques (UIBM) ;
  • Des captures d’écran du site web de la marque.

Après examen de ces preuves, l’EUIPO a reconnu que la marque Max&Co jouissait d’une réputation significative en Italie, au moins en ce qui concerne les vêtements.

L’évaluation du « lien » entre les signes

Afin d’établir un risque de préjudice, la jurisprudence exige qu’il soit démontré que le public pertinent est susceptible d’établir un lien mental (ou une association) entre la marque antérieure et le signe contesté.

Les critères principaux examinés pour évaluer un tel « lien » comprennent :

  1. Le degré de similitudes entre les signes.
  2. La nature des produits et services, y compris leur degré de similitude ou différence.
  3. Le degré de réputation de la marque antérieure.
  4. Le caractère distinctif de la marque antérieure, inné ou acquis par l’usage.
  5. L’existence d’un risque de confusion pour le public.

Dans le cas présent, l’EUIPO a jugé que les signes étaient très similaires (élément commun Max&Co) et que la marque antérieure bénéficiait d’une réputation significative et d’un caractère distinctif normal.

Même si les biens (vêtements) et les services (transports) sont dissimilaires, l’EUIPO a identifié un lien pertinent :

  • Les services de transport peuvent concerner n’importe quelle catégorie de produits, y compris les vêtements.
  • Dans l’ère numérique, les fabricants de mode participent souvent activement à la livraison de leurs produits via leurs plateformes en ligne.

Ainsi, le public pertinent pourrait associer mentalement le signe contesté à la marque Max&Co, croyant que les services de transport proviennent de la maison de mode ou que les produits transportés sont liés à cette marque.

euipo esprit public

L’avantage indu et le parasitisme commercial

L’EUIPO a ensuite évalué si le signe contesté pourrait tirer un avantage indu de la réputation de la marque Max&Co :

  • Les consommateurs pourraient attribuer au transporteur les standards de qualité et de réputation dans ce domaine ;
  • Le signe contesté pourrait transférer l’image de fiabilité et d’efficacité logistique de Max&Co au service de transport, facilitant sa commercialisation de manière injuste

Sur cette base, l’EUIPO a rejetté la demande de marque pour l’ensemble des services revendiqués.

Conclusion

L’affaire Max&Co confirme l’importance de la réputation d’une marque comme outil de protection, même lorsque les produits ou services sont non liés. L’EUIPO renforce ainsi la protection des marques de renommée contre le parasitisme commercial et le free-riding, en particulier dans des secteurs comme la mode où l’image et la qualité perçue sont essentielles.

Cette décision illustre également que la réputation permet d’étendre la protection de la marque au-delà de sa classe initiale, en tenant compte des pratiques commerciales modernes, notamment la vente et la livraison en ligne.

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Nathalie Dreyfus avec l’aide de toute l’équipe du cabinet Dreyfus

FAQ

1. La renommée d’une marque permet-elle de s’opposer à l’enregistrement d’un signe pour des produits non similaires ?
Oui. La notoriété d’une marque lui permet de s’opposer à l’enregistrement d’un signe identique ou similaire pour des produits ou services non similaires, dès lors que cet enregistrement crée un lien dans l’esprit du public ou tire indûment profit de sa renommée.

2. Quels critères l’EUIPO examine-t-il pour établir ce lien ?
La similitude des signes, la réputation et le caractère distinctif de la marque antérieure, la nature des biens ou services et le risque de confusion pour le public.

3. Qu’est-ce que le risque d’avantage indu (free-riding) ?
C’est lorsqu’un signe contesté profite de la réputation d’une marque connue pour se commercialiser plus facilement, sans avoir à investir dans sa propre réputation.

4. Quel impact pour les marques dans le secteur de la mode ?
Les marques de renommée bénéficient d’une protection renforcée, pouvant s’étendre à des services non liés mais connectés dans l’esprit des consommateurs, notamment grâce au commerce en ligne et aux services logistiques.