La lutte contre la contrefaçon et les atteintes aux droits de propriété intellectuelle demeure un enjeu économique, juridique et sécuritaire majeur, touchant tous les secteurs : mode, luxe, technologie, pharmaceutique, ou encore produits de grande consommation. Chaque année, les services douaniers français interceptent des millions de produits contrefaits, représentant un manque à gagner considérable pour les titulaires de droits et un danger pour les consommateurs.

 

Dans ce contexte, l’action proactive des douanes est devenue un pilier de la protection des droits. En vertu du Règlement (UE) n° 608/2013 et de ses dispositions nationales de transposition, notamment le Code des douanes et le Code de la propriété intellectuelle, les autorités douanières disposent, depuis plusieurs années, du pouvoir d’initier de leur propre initiative une saisie dès lors que des marchandises suspectes sont détectées, même sans demande préalable du titulaire de droits. Cette compétence, désormais pleinement intégrée aux pratiques opérationnelles et soutenue par des instructions internes, a transformé en profondeur la stratégie de protection douanière : elle renforce la réactivité, optimise la prévention et constitue un outil efficace pour endiguer l’entrée de produits contrefaits sur le marché.

 

Ce dispositif, bien maîtrisé, peut devenir un véritable rempart juridique et opérationnel pour toute entreprise soucieuse de défendre ses actifs immatériels.

 

Contexte et évolution du cadre juridique

La saisie douanière est un outil essentiel dans la lutte contre la contrefaçon et l’importation illicite de marchandises portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle. Historiquement, l’intervention des douanes supposait souvent une demande expresse du titulaire de droits. Cependant, les textes européens et nationaux ont progressivement élargi les pouvoirs de l’administration douanière, lui permettant d’intervenir de sa propre initiative lorsqu’elle identifie des marchandises suspectes, conformément au Règlement (UE) n° 608/2013 et aux articles L. 521-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

En France, les douanes peuvent initier seules une retenue dès lors qu’elles disposent d’éléments objectifs permettant de présumer une atteinte aux droits. Cette interprétation constitue un avantage stratégique majeur pour les titulaires, qui bénéficient ainsi d’une protection proactive.

 

Conditions et procédure de mise en œuvre

Déclenchement par l’administration douanière

L’initiative de la saisie peut désormais provenir :

  • D’une demande d’intervention préalable déposée par le titulaire, valable pour une durée déterminée et renouvelable.
  • D’une détection spontanée par les douanes, même sans demande préalable, si des signes évidents de contrefaçon ou d’atteinte sont identifiés.

Les services douaniers agissent alors sans délai afin d’éviter la dispersion des marchandises, en les immobilisant dans des lieux sécurisés.

Droits et obligations du titulaire

Une fois la saisie effectuée, le titulaire est immédiatement informé et dispose :

  • D’un délai de 10 jours ouvrables (prolongeable) pour engager une action en justice ou confirmer la contrefaçon.
  • De la possibilité de solliciter la destruction simplifiée si le déclarant ou le détenteur des marchandises ne s’oppose pas à la saisie.

En contrepartie, le titulaire doit fournir les preuves de ses droits (certificats d’enregistrement, preuves d’usage le cas échéant) et collaborer étroitement avec les douanes pour la qualification des produits.

 

Avantages pratiques pour les titulaires de droits

L’élargissement du rôle des douanes présente plusieurs bénéfices :

  • Réactivité accrue : intervention même en l’absence de demande initiale.
  • Réduction des flux de contrefaçons avant leur mise sur le marché.
  • Gain de temps et de ressources pour les titulaires, qui peuvent concentrer leurs efforts sur la phase contentieuse.
  • Renforcement de la dissuasion : les importateurs illicites savent que la surveillance est permanente.

 

efficacite douanes
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Limites et précautions à prendre

Malgré ces avancées, certaines précautions s’imposent :

  • Maintenir à jour les demandes d’intervention douanière pour couvrir toutes les catégories de produits et pays de provenance.
  • Fournir aux douanes des fiches descriptives détaillées permettant d’identifier rapidement les produits contrefaits.
  • Anticiper les coûts et délais liés aux actions judiciaires si la saisie est contestée.
  • Prendre en compte les risques de rétention abusive et la nécessité de vérifier la réalité de l’atteinte.

 

Conclusion et perspectives

La capacité des douanes à initier elles-mêmes une saisie renforce considérablement la protection des droits de propriété intellectuelle. En combinant ce pouvoir avec une collaboration proactive entre titulaires et administration, il est possible de réduire significativement l’entrée de marchandises contrefaites sur le territoire.

Le cadre juridique européen pourrait encore évoluer, notamment pour renforcer la coopération entre États membres et améliorer l’échange d’informations.

 

Le cabinet Dreyfus & Associés est en partenariat avec un réseau mondial d’avocats spécialisés en Propriété Intellectuelle.

Nathalie Dreyfus avec l’aide de toute l’équipe du cabinet Dreyfus.

 

FAQ

 

1. Qu’est-ce qu’une saisie douanière ?

Il s’agit de la retenue par les services douaniers de marchandises suspectées de porter atteinte à un droit de propriété intellectuelle.

2. Les douanes peuvent-elles agir sans demande du titulaire ?

Oui, si elles détectent des indices objectifs de contrefaçon.

3. Quel est le délai pour agir après notification de la saisie ?

En général 10 jours ouvrables, avec possibilité de prolongation.

4. Quels documents fournir aux douanes ?

Certificats d’enregistrement, preuves d’usage et fiches descriptives des produits.

5. Ce mécanisme s’applique-t-il à toutes les formes de propriété intellectuelle ?

Oui, aux marques, dessins et modèles, droits d’auteur, brevets, indications géographiques, etc.