L’usage de la marque en lien avec les services qu’elle vise permet de reconnaitre un intérêt légitime au défendeur dans le cadre de la procédure UDRP.
En vertu du paragraphe 4 (a) (ii) de la politique de règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine (« UDRP »), il faut réunir trois éléments cumulatifs pour que le requérant emporte l’affaire. La deuxième exigence du requérant est d’établir une preuve prima facie que le défendeur n’a pas de droits ou d’intérêts légitimes sur les noms de domaine contestés. A défaut, il arrive que l’Expert chargé de la résolution d’un litige rejette la plainte lorsque l’exigence n’est pas établie sans avoir à démontrer la troisième. Cette exception est rappelée par l’affaire de réservation de noms de domaine litigieux <cloud-mojo.com>, <cloudmojo.tech>, <cloudmojotech.com> et <cloudmojotech.website> (OMPI, n° D2021-3197). À travers cette décision, l’Expert souligne que l’intérêt légitime du défendeur est avéré dans la mesure ou l’entreprise du défendeur reflète sa dénomination sociale dans un nom de domaine, d’autant que l’exploitation de la marque déposée est en rapport avec les services pour lesquels elle est enregistrée.
Nous sommes heureux de vous présenter le Podcast » Women’s IP World Podcast » dans lequel Nathalie Dreyfus, fondatrice du cabinet Dreyfus & associés est l’invitée de Michele Katz, la fondatrice et CEO de Advitam IP, LLC.
Si vous souhaitez en savoir plus sur les sujets de l’entreprenariat dans la propriété intellectuelle et découvrir une vision riche et expérimentée en la matière, vous pouvez également lire l’article que Nathalie Dreyfus a écrit pour « Women’s IP World Annual ».
L’adhésion à un système facilitant l’accès à la protection des dessins et modèles
Le système de la Haye a été mis en place pour faciliter la protection des dessins et modèles industriels à l’international, via un système de dépôt simplifié auprès d’un organisme unique : l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Actuellement, 76 parties contractantes sont membres du système réunissant 93 pays, dont la France, l’Union européenne, les Etats-Unis, mais également de nombreux pays d’Afrique, d’Asie ou encore d’Europe de l’Est. Face à l’importance de l’apparence d’un produit, de nombreux pays ont ratifié l’Arrangement de la Haye dans les dernières années. La Chine devient la 77ème partie contractante à l’Arrangement.
Le dépôt de dessins et modèles auprès de l’OMPI permet une protection de ces derniers dans les pays choisis – sous couvert qu’ils aient effectivement adhéré au système de la Haye – en acquittant une taxe pour chaque pays demandé. Il ne s’agit donc pas à proprement parler d’une protection internationale, puisque chaque titre ne reste valable que sur le territoire concerné. De même, tous les actes relatifs à la protection du dessin ou modèle (inscription, renouvellement) se font dans une procédure unique.
Les conséquences d’une telle adhésion
Désormais, tous les créateurs chinois pourront profiter du système international des dessins et modèles. Plus rapide et moins onéreux, il limite les formalités en prévoyant un seul dépôt pouvant couvrir jusqu’à 100 dessins ou modèles. Les créateurs étrangers pourront quant à eux accéder plus aisément au marché chinois, le plus important en matière de demandes de dessins et modèles. En 2020, l’Office chinois de la propriété intellectuelle a en effet reçu des demandes contenant quelques 770 362 dessins et modèles, soit environ 55% du total mondial des demandes. A titre de comparaison, l’Office européen des marques, l’EUIPO affiche « seulement » 113 196 dessins et modèles déposés.
Attention toutefois, le seul dépôt d’un dessin ou modèle auprès de l’OMPI ne garantit pas sa protection dans tous les pays demandés. C’est l’OMPI qui le notifie à tous les offices des Etats désignés pour un examen propre à chaque législation. Il convient dès lors d’être particulièrement attentif aux conditions de protection. Par exemple en France : la nouveauté, le caractère propre et la visibilité du dessin ou modèle !
La législation française en matière de protection des dessins et modèles prévoit un délai de grâce de 12 mois après la première divulgation du dessin et modèle, pour déposer une demande de protection. La Chine, à l’inverse, impose la nécessité d’une nouveauté absolue. Il sera donc nécessaire d’être attentif aux conditions de protection spécifiques à certains pays pour optimiser la protection d’un dessin ou modèle à l’international.
Cette adhésion de la Chine à l’Arrangement de la Haye constitue donc une réelle avancée dans l’homogénéisation des dépôts de dessins et modèles. La Chine devient ainsi la 77ème partie contractante de l’Arrangement de la Hayeet laisse espérer une adhésion prochaine d’autres Etats à l’innovation forte.
Trademark Modernization Act: des nouvelles procédures efficaces et rapides contre les marques américaines non-utilisées.
Aux États-Unis, le système des marques est fondé sur l’usage. Cela signifie que les titulaires de marques sont censés utiliser leurs marques pour les produits et services qu’ils commercialisent aux États-Unis.
Contrairement au système de marques de l’UE, cette exigence d’utilisation s’applique aussi bien avant qu’après l’enregistrement des marques américaines. Le système américain exige que les marques soient utilisées avant leur dépôt effectif. En ce qui concerne les enregistrements de marques étrangères, l’intention d’utiliser la marque aux États-Unis est requise.
Ce système prévoit deux procédures traditionnelles d’annulation des marques non utilisées : la procédure d’annulation fondée sur l’« abandon » et la procédure d’annulation fondée sur le « non-usage ». Bien que la première procédure exige le défaut d’usage et l’absence d’intention de la réutiliser, la seconde exige une non-utilisation affirmée dans les 5 ans suivant son enregistrement.
Ces deux procédures d’annulation s’appliquent encore aujourd’hui.
Cependant, le problème est qu’elles sont très coûteuses, chronophages et pas toujours efficaces. En plus, pour faire échec à cette procédure, il suffit que le titulaire démontre son intention de commencer ou de reprendre l’exploitation de sa marque.
Néanmoins, ce système a changé avec le ‘Trademark Modernization Act’.
Le Trademark Modernization Act est entré en vigueur le 18 décembre 2020. Cette loi n’est pas sans impact pour les titulaires de marques américaines et pour les futurs déposants. Elle concerne les marques protégées aux États-Unis que ce soit par le biais d’un dépôt national ou par un dépôt international désignant les États-Unis.
Cette nouvelle loi ajoute deux nouvelles procédures qui s’appliquent aux marques américaines non utilisées.
Procédure de radiation
La première nouvelle procédure est la « ex parte expungement petition” ou la procédure de radiation.
Quoi ?
Il s’agit d’une nouvelle procédure qui vise à annuler les marques déposées aux États-Unis pour défaut d’usage. Il s’agit des marques nationales et internationales (désignant les États-Unis) qui n’ont jamais été exploitées aux États-Unis dans le commerce et/ou en relation avec les produits et/ou services après leur enregistrement.
L’action peut être engagée par tout tiers – contrairement aux procédures d’annulation traditionnelles – et n’exige pas de preuve de défaut d’intention de reprendre l’usage de la marque.
Quand ?
Jusqu’au 27 décembre 2023, les demandeurs peuvent initier la procédure à l’encontre de toutes les marques américaines ayant plus de trois ans.
Après cette date, le délai d’action se trouve réduit et ne concerne plus que les marques ayant été enregistrées depuis au moins trois ans mais pas depuis plus de dix ans.
Conséquence ?
Le titulaire de la marque dispose d’un délai de trois mois suivant l’action pour fournir la preuve d’usage. La charge de la preuve, étant soumise à une interprétation stricte, incombe donc entièrement au titulaire. En cas de preuve d’usage insuffisante, l’enregistrement de la marque sera partiellement/totalement annulé.
La procédure de réexamen
La deuxième nouvelle procédure est la « ex parte examination petition” ou la procédure de réexamen.
Quoi ?
Il s’agit d’une nouvelle procédure qui permet le réexamen des marques qui ont été enregistrées par un dépôt national (États-Unis) ou international (désignant les États-Unis) qui n’ont pas été utilisées dans le commerce/en relation avec des produits et services désignés à une date certaine.
Cette date dépendra du fondement de la demande de marque. Ainsi, si la demande de marque était fondée sur un usage plus ancien du signe dans le commerce, alors la date d’usage pour cette procédure serait la date de dépôt de la marque.
En revanche, si la demande de marque était fondée sur une intention d’usage, alors la date d’usage sera la plus tardive des dates suivantes : la date à laquelle un amendement pour alléguer l’usage a été déposé ou la date à laquelle le délai pour déposer une déclaration d’utilisation a expiré.
Quand ?
Il est possible d’engager cette procédure dans les cinq ans à compter de l’enregistrement de la marque.
Conséquences ?
Il incombe au titulaire de la marque de fournir la preuve d’usage de sa marque pour tous les produits et services couverts. Comme l’interprétation est stricte, le risque de réexamen d’enregistrement de la marque augmente en cas de preuve insuffisante, ce qui peut rendre la marque plus vulnérable.
(Dés)avantages?
D’abord, il s’agit de procédures plus faciles et moins coûteuses. Contrairement à la procédure traditionnelle d’annulation, l’élément d’abandon n’est pas exigé par ces procédures. A cet égard, le fait qu’un titulaire de marque ait l’intention de reprendre l’usage n’est pas donc pas pertinent.
Deuxièmement, ces nouvelles procédures permettent de se débarrasser plus facilement des marques non utilisées (‘deadwood’) et, par conséquent, d’enregistrer les marques (non utilisées) plus rapidement et à moindre coût. Avant l’entrée en vigueur du Trademark Modernization Act, il était généralement difficile de déposer une demande d’enregistrement lorsqu’une marque antérieure similaire ou identique non utilisée empêchait le dépôt. Dans ce contexte, les procédures d’annulation pouvaient prendre plusieurs années et entraîner des coûts importants. Grâce aux nouvelles procédures, il est devenu plus évident et moins fastidieux d’agir contre les marques non utilisées.
D’autre part, ces nouvelles procédures exigent que les titulaires de marques américains soient (plus) prudents et vigilants. Non seulement ils sont tenus d’utiliser leurs marques de façon véritable et de bonne foi, ils doivent également garder des preuves d’usage de leurs marques aux États-Unis, tant avant qu’après l’enregistrement de celles-ci. Sinon, le risque d’annulation augmente, ce qui facilite l’enregistrement de la marque par des concurrents. Moins les titulaires arrivent à démontrer l’usage de leurs marques, plus le risque de perte augmente et plus il est facile pour les concurrents d’enregistrer des marques similaires et même identiques.
Les nouvelles procédures permettent donc d’agir contre des marques américaines non-utilisées de manière plus rapide et plus étendue.
Nous vous recommandons donc de faire un audit de vos droits de marques sur le territoire américain, afin d’éviter le risque d’action en annulation ou en réexamen à l’encontre de vos marques.
En ce qui concerne vos dépôts de marques en cours d’examen, nous vous invitons à nous contacter afin que nous réfléchissions conjointement à la meilleure stratégie à adopter au vu de cette nouvelle réglementation.
Nous pouvons également vous accompagner dans l’analyse de vos marques afin d’identifier les produits et/ou services qui seraient susceptibles de fragiliser vos marques.
Le 2 novembre 2020, Louis Vuitton Malletier a formé une opposition contre la demande d’enregistrement de la marque figurative « LOVES VITTORIO » désignant les mêmes produits en classes 25 et 26, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, point b du règlement sur les marques de l’Union européenne (RMUE). L’Office rejette cette opposition en raison d’une faible similitude entre le signe antérieur et le signe contesté, ne suffisant pas ainsi à engendrer un risque de confusion chez le consommateur d’attention moyenne. Si l’opposant invoque l’article 8, paragraphe 5, du RMUE relatif à la renommée de la marque, les juges rejettent ce grief sans examen au fond dû à un défaut de preuves.
1. L’appréciation du risque de confusion au regard de l’impression d’ensemble donnée par les signes
Depuis l’arrêt « SABEL BV contre Puma AG » rendu le 11 novembre 1997 par la Cour de Justice des Communautés Européennes, une nouvelle approche de l’appréciation de la similitude entre deux signes a été avancée. Cette dernière se veut être plus globale, notamment par l’étude de trois critères qui sont l’aspect visuel, le plan auditif et conceptuel. Ainsi, l’Office analyse étape par étape ces critères entre la marque antérieure et la demande d’enregistrement de la marque litigieuse.
Tout d’abord sur l’aspect visuel, l’Office retient une similitude à très faible degré dans la mesure où les deux signes « n’ont en commun que la lettre L » et « coïncident partiellement dans la stylisation des deux lettres ». En outre, malgré l’identité de stylisation et des couleurs utilisées dans les deux signes, les consommateurs percevront ces éléments comme étant simplement décoratifs. Les juges retiennent surtout une différence entre les deux signes par l’ajout des mots « LOVES » et « VITTORIO » et de la lettre « N » dans le signe contesté.
De même sur le plan auditif, les juges ne retiennent qu’un faible degré de similitude dans la prononciation de la lettre « L ».
Enfin, l’Office affirme que les deux signes sont conceptuellement différents.
Ainsi, l’Office conclut que les quelques similitudes entre les deux signes ne suffisent pas à entraîner un risque de confusion chez le consommateur disposant d’un degré d’attention moyenne et que celui-ci distinguera l’origine ainsi que la provenance de chaque signe. En outre, le public pertinent percevra le signe dans son ensemble, notamment par l’ajout des termes « LOVES » et « VITTORIO » ainsi que les lettres « L » et « N » et ne se limitera pas à la même stylisation.
Cependant, force est de constater qu’il existe malgré tout une similitude visuelle pouvant amener le public pertinent à ne pas percevoir de manière nette et précise la différence entre les lettres « LV » et « LN », d’autant plus que le terme ajouté est « VITTORIO ».
2. La regrettable exclusion de la renommée de la marque antérieure
Cette décision peut paraître à première vue étonnante dans le sens où la marque antérieure « LV » est une marque jouissant supposément d’une forte notoriété.
En effet, cette renommée aurait probablement pu amener les juges à faire droit à la demande d’opposition de la demande d’enregistrement de la marque contestée, si cette dernière « « [tirait] indûment profit du caractère distinctif » ; « ou de la renommée de la marque antérieure » ; « ou leur [portait] préjudice ».
Toutefois, cette exclusion de la renommée de la marque se justifie pleinement dans la mesure où l’Office rend sa décision en se limitant aux preuves et arguments fournis par l’opposant. Or, ce dernier n’a pas apporté de preuves attestant de la renommée de la marque, conformément à l’article 7, paragraphe 2, point f) du règlement délégué sur les marques européennes.
Ainsi, il est essentiel avant toute opposition d’analyser la similitude entre les signes et les produits et services entre votre marque et la demande de marque litigieuse, et surtout de fournir toutes les preuves pertinentes démontrant l’usage intensif de la marque ou encore de sa renommée.
En effet, cette décision postule de l’importance des preuves fournies au cours d’une procédure relative aux motifs relatifs de refus d’enregistrement d’une demande de marque, preuves qui auraient sans doute pu permettre une tournure différente.
La procédure UDRP vise a connaitre des cas de cybersquatting abusif.
L’UDRP est une procédure administrative rationalisée et peu coûteuse qui ne s’applique qu’à des cas précis de cybersquatting abusif. Il arrive en effet que l’Expert chargé de la résolution d’un litige refuse une plainte au motif que les faits dépassent le cadre de la simple procédure UDRP. Ce fut notamment le cas dans une affaire relative au nom de domaine litigieux <royaldragonvodka.com> (OMPI, D2021-2871), impliquant des revendications concurrentes de droits sur plusieurs marques. Par cette décision, l’Expert rappelle que la procédure UDRP n’a pas vocation à s’inscrire dans la résolution de litiges plus larges que ceux liés uniquement aux noms de domaine.
Dans un litige opposant une société hollandaise aux pharmaciens et e-pharmaciens français, la cour d’appel de Paris a jugé le 17 septembre 2021 que le vendeur établi aux Pays-Bas ayant réalisé de la publicité sur le territoire français et sur l’espace numérique n’avait pas commis d’acte de concurrence déloyale.
En 2015, shop-pharmacie.fr, site de vente en ligne de médicaments sans ordonnance médicale administré par une société hollandaise, lance une grande campagne publicitaire sur le territoire français. Des millions de prospectus ont ainsi été insérés dans colis postaux expédiés par des grands acteurs du e-commerce tels que Zalando et La Redoute. La société hollandaise avait aussi procédé à une stratégie de référencement payant sur Internet, à destination du public français.
Cette campagne, qu’une société française ne pourrait en tout état de cause pas mener, est apparue démesurée et même déloyale pour plusieurs associations représentatives de la profession. L’Union des groupements de pharmaciens et l’Association française des pharmaciens en ligne ont alors cherché à faire qualifier cette campagne d’acte de concurrence déloyale, en fondant leur demande sur des dispositions de notre code de la santé publique.
Le tribunal de commerce de Paris ayant accueilli cette demande, la société hollandaise a fait appel de la décision et la cour d’appel de Paris a saisi la Cour de justice de l’Union européenne. La question posée revenait à déterminer si la France pouvait appliquer aux e-pharmacies établies dans un autre Etat membre de l’UE les mêmes restrictions qu’elle impose aux e-pharmacies françaises concernant la promotion de leur activité et de leurs produits sur son territoire.
Les intérêts supérieurs du marché intérieur et le rejet du protectionnisme français
La réglementation européenne et notamment l’article 34 TFUE et les dispositions de la directive 2001/83 permet-elle à un Etat membre de l’UE d’imposer sur son territoire aux pharmaciens ressortissants d’un autre Etat membre de l’UE des règles issues des articles R.4235-22 et R.4235-64 du code de la santé publique et des bonnes pratiques édictées par l’autorité publique de l’Etat membre ?
Ce coup d’arrêt au protectionnisme des dispositions françaises avait été amorcé en 2016 par l’Autorité de la concurrence qui avait alors énoncé à propos des textes français qu’ils introduisaient des « contraintes additionnelles qui apparaissent disproportionnées par rapport à l’objectif de protection de la santé publique » (Autorité de la concurrence, 20/04/2016 avis n°16-A-09 point 91). En 2019, un nouvel avis appuyait davantage cette vision et énonçait notamment que la vente en ligne était « obérée dans son développement par des contraintes excessives qui brident le développement des acteurs installés en France par rapport à leurs homologues européens » (Autorité de la concurrence, 04/04/2019 avis n°19-A-08).
Le juge européen a donc décidé de modérer l’application des restrictions de droit français afin de préserver le marché intérieur.
Possibilité de limiter la publicité sur le territoire français par des dispositions ciblées
La Cour de Justice de l’Union européenne a posé un premier principe aux termes duquel un Etat-Membre peut imposer une restriction de la publicité à condition que sa législation soit strictement délimitée. La cour d’appel de Paris a suivi cette précision dans le litige opposant les pharmaciens français à la e-pharmacie hollandaise et a jugé que les dispositions invoquées du Code de la santé publique n’étaient pas assez précises. Elles ne ciblaient notamment pas uniquement les médicaments, mais évoquaient les termes généraux de « produits pharmaceutiques ».
La porte est donc laissée ouverte au législateur national pour préciser davantage ses dispositions relatives à l’encadrement de la publicité pour des médicaments.
Le référencement payant sur Internet en principe possible pour les sociétés établies dans un autre Etat membre de l’Union européenne
Afin de prévenir la surconsommation de médicaments, la loi française interdit les e-pharmacies françaises de mener des campagnes de référencement payant sur l’espace numérique, notamment sur les moteurs de recherche et les comparateurs de prix.
Dans cette affaire, la Cour de justice de l’UE a pu énoncer que ce type de référencement était en principe possible, à moins qu’il soit limité par une mesure nécessaire et proportionnée à l’objectif de sauvegarde de la santé publique. Le principe est donc celui d’une possibilité de référencement, à moins que l’Etat membre opposant rapporte la preuve d’une règle de droit ciblée, proportionnée et nécessaire.
Or, une telle législation n’existe pas en France. De plus, les articles du code la santé publique versés au débat semblent inadéquats au commerce électronique. En effet, le e-commerce possède des contraintes propres que sont son accès universel, instantané et continu sur Internet. Par conséquent, il apparait très épineux d’encadrer de manière suffisamment concrète et précise la pratique du référencement payant sur Internet pour ce type d’activité.
En conclusion, les e-pharmaciens français et les e-pharmaciens situés dans d’autres Etats membres de l’Union européenne ne sont pas sur un pied d’égalité concernant la publicité réalisée en France.
Cette affaire aura permis à la cour d’appel de Paris de réaffirmer le droit au référencement payant en énonçant que l’arrêté du 1er décembre 2016 “relatif aux règles techniques applicables aux sites internet de commerce électronique de médicaments” et portant notamment sur l’interdiction du référencement dans des moteurs de recherche ou des comparateurs de prix contre rémunération, était inopposable et, au surplus, qu’il avait été annulé par le Conseil d’Etat le 17 mars 2021.
LE NOM <PARISTECH.ORG>, OPERE PAR DES ENTREPRENEURS PARISIENS, NE PORTERAIT PAS ATTEINTE AUX DROITS DE PARISTECH.
Une décision UDRP surprenante a été rendue en octobre 2021, concernant le nom de domaine <paristech.org>, à l’encontre duquel la Fondation française ParisTech avait déposé une plainte (OMPI, D2021-2417). Malgré la notoriété de ParisTech et le fait que le nom de domaine litigieux était identique aux marques antérieures de ParisTech et exploité pour un site en français, où est implantée ParisTech, l’Expert a considéré que la preuve de l’enregistrement du nom de mauvaise foi n’était pas rapportée.
Le métavers, ce monde parallèle virtuel en plein essor à l’ère du Web 3.0, devient un sujet incontournable. Ce monde fictif devrait associer simultanément réalité virtuelle (VR), réalité augmentée (AR), blockchain, crypto-monnaies, réseaux sociaux, etc. Nombreuses sont les entreprises qui y projettent déjà l’exercice d’une activité commerciale au terme d’une transition digitale de l’entreprise toujours plus poussée.
Ainsi, les dépôts de marque couvrant des produits et services afférents à des « objets virtuels numériques » se multiplient depuis la fin de l’année 2021.
Mais comment protéger efficacement cette nouvelle activité qui fait appel à tout un nouveau lexique ?
1.Le métavers, un nouveau monde pour de nouvelles ambitions ?
En peu de mots, le métavers se définit comme un univers virtuel fictif, contraction des mots « meta » et « univers », pour désigner un méta-univers dans lequel les interactions sociales seraient prolongées et numérisées. Il semble directement inspiré du roman, paru en 1992, « Snow Crash » (« Le Samourai virtuel » en français) de Neal Stephenson.
Cet environnement numérique parallèle incarne dorénavant un moyen d’explorer, sous un angle nouveau, des projets innovants et ambitieux avant que ceux-ci prennent concrètement forme dans le monde réel.
A titre d’exemple, Aglet a créé sa propre gamme de sneakers, les « TELGAs », après avoir été lancée en collection numérique dans des jeux en ligne, par ailleurs disponible sur la plateforme OpenSea, aux côtés de marques telles que Nike et Adidas, lesquelles ont franchi le cap de collections virtuelles sous forme de jetons non fongibles (Non-Fungible Token en anglais (NFTs)).
Les NFTs, dont les transactions sont essentiellement hébergées sur la blockchain Ethereum, constituent des composants essentiels du métavers. Cette catégorie d’actif numérique, qui se distingue des crypto-monnaies telles que le Bitcoin et l’Ether, permettent notamment de certifier, de façon authentique et infalsifiable, la propriété d’un de ces objets numériques virtuels proposés à la vente dans le métavers.
Le métavers s’inscrit dans la continuité des réseaux sociaux et a vocation à permettre aux entreprises d’établir une forte présence en ligne, au-delà de l’exploitation d’un site web traditionnel.
Même si nul ne peut prédire avec certitude si le métavers est une tendance qui va se pérenniser pour s’ancrer en définitive dans nos cultures, nombreuses sont les grandes entreprises qui ont d’ores et déjà sauté le pas.
Avant de se lancer, déposer des marques spécifiques, adaptées aux produits et services du métavers, est nécessaire pour être suffisamment protégé contre les atteintes et pour valoriser l’actif marque de la société. Dans cette optique, il convient de rédiger un libellé adéquat pour la marque.
2.Comment envisager une protection adéquate et optimale ?
Au stade de la projection d’une activité dans le métavers, il convient de mener une première réflexion sur la définition des produits et services envisagés car l’élément crucial d’une marque c’est aussi et surtout son libellé. La procédure de dépôt d’une demande auprès de l’INPI,l’EUIPO ou tout autre office de propriété industrielle national, va en effet permettre de garantir, dans une certaine mesure, un monopole d’exploitation sur les produits et services déterminés et de conférer une valeur commerciale à la marque, une fois celle-ci enregistrée par un office de propriété industrielle.
Pour rappel, une fois une demande de marque déposée, il est impossible par la suite d’ajouter des classes de produits et services, ni d’ajouter des produits ou services. Seule une modification dans le sens d’une restriction du libellé sera envisageable.
Les classes particulièrement pertinentes, qui vont contribuer à constituer une base du libellé, sont les classes 9 et 41.
La classe 9permet de couvrir les NFT, bien que le produit puisse ne pas être accepté en tant que tel. Une rédaction plus explicative sera de mise. Par exemple, l’on peut viser les « produits numériques téléchargeables, à savoir objets numériques créées à l’aide d’une technologie blockchain ». Ces produits peuvent être de toutes sortes : vêtements, œuvres d’art, etc.
La classe 41couvre les éléments constitutifs du divertissement. Dans cet ordre d’idée, les MMORPG qui sont définis comme des jeux interactifs, lesquels par leur nature et leur concordance sont étroitement associés au métavers, pourront être notamment visés en classe 41.
Dès lors qu’une marque virtuelle a pour objet d’être exploitée par le biais de points de vente, la classe de services 35 paraît incontournable pour comprendre ainsi entre autres des « services de magasin de vente au détail de produits virtuels ».
Dans une vision complémentaire, il faudra alors penser à désigner les produits correspondants dans les classes qui les couvrent classiquement.
3.Des marques virtuelles déposées dans des secteurs variés
Au début du mois de février 2022, Pumpernickel Associates, LLC a procédé à la demande d’enregistrement de marques « PANERAVERSE » n° 97251535 auprès de l’office de marques américain, l’USPTO. Ce dépôt initié pour des produits alimentaires et des boissons virtuels, des NFTs et la possibilité d’acheter des produits réels dans le monde virtuel, démontre une volonté certaine de l’entreprise américaine à déployer ces points de vente dans le métavers.
McDonald’s a également déposé des marques (n°97253179; n°97253170; n°97253159) portant sur « l’exploitation d’un restaurant virtuel proposant des produits réels et virtuels » et sur « l’exploitation d’un restaurant virtuel en ligne proposant la livraison à domicile ». Par ailleurs, la chaîne américaine de restauration rapide compte également obtenir une marque pour des « concerts réels et virtuels en ligne » et d’autres services de divertissement pour un McCafé virtuel (n°97253767; n°97253361; n°97253336).
Il ne s’agit pas des seules marques déposées à ce jour, les pionniers de cette tendance ont notamment été Facebook et Nike, suivis désormais par les marques de luxe, textile, cosmétique et parfumerie. L’Oréal a, par exemple, déposé plusieurs demandes d’enregistrement de marques de parfumerie issues de son portefeuille, dans leur versant numérique, auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).
4. Considérations conceptuelles
Au stade de cet engouement inédit autour du métavers, l’on pourrait se demander si ces biens immatériels dont l’usage projeté est exclusivement destiné à une exploitation virtuelle, ne devraient finalement pas relever d’une catégorie de produits particulière, non définie à ce jour au terme de la Classification de Nice.
L’ajout d’une classe ad hoc dédiée à ces produits et services virtuels paraît complexe dans la mesure où ils pourraient, pour beaucoup, venir se superposer avec les produits et services existants déjà. La liste risquerait d’être très longue.
En tout état de cause, rédiger son libellé de marque pour le métavers suppose un travail minutieux de définition des produits et services concernés.
La Classification de Nice, malgré les dépôts successifs de marques réalisés depuis novembre 2021, n’inclut pour l’instant pas, dans ses notes explicatives ou les suggestions de produits, une quelconque référence à des produits et/ou services en lien étroit avec le métavers ou les NFTs, mais peut-être le fera-t-elle prochainement au vu des évolutions rencontrées.
Dreyfus est à votre disposition pour vous accompagner dans la protection de vos marques à l’ère du métavers et rédiger avec vous un libellé de produits et services adapté à votre activité.
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