Nathalie Dreyfus

L’annulation de l’interdiction des expressions « steaks de soja » et « saucisses végétales »

Le 28 janvier 2025, par deux décisions majeures (n° 465835 et n° 492839), le Conseil d’État a annulé les décrets n° 2022-947 et n° 2024-144 interdisant l’usage des expressions « steaks de soja » et « saucisses végétales ». Cette décision s’aligne sur la position de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui avait précédemment abordé cette question (arrêt du 4 octobre 2024, affaire C‑438/23). Ce jugement a des répercussions importantes pour l’industrie alimentaire, notamment en ce qui concerne l’étiquetage des produits végétaux. Il marque également un tournant dans le débat juridique sur l’utilisation de terminologies traditionnelles dans le secteur alimentaire face à la montée des alternatives végétales. Dreyfus vous accompagne pour expliquer la portée de ces décisions.

Contexte de l’affaire

Le cadre juridique de l’interdiction

L’interdiction des termes « steaks de soja » et « saucisses végétales » avait été imposée par le gouvernement français en raison de préoccupations concernant la possibilité que ces expressions induisent en erreur les consommateurs, en leur faisant croire que les produits étaient à base de viande. Cependant, des entreprises du secteur végétal ont contesté ces décrets, estimant qu’ils constituaient une restriction injustifiée de leur liberté de commercialisation. La question de savoir si cette interdiction respectait les principes européens en matière de concurrence et de liberté de marché a été soulevée, et c’est ainsi que le Conseil d’État a pris la décision de revenir sur cette mesure.

Le rôle du droit européen

La décision du Conseil d’État intervient après un arrêt important rendu par la CJUE le 4 octobre 2024 (affaire C‑438/23). La Cour avait jugé que de telles interdictions pouvaient enfreindre la liberté commerciale des entreprises, tant que les produits étaient clairement étiquetés comme étant d’origine végétale et non animale. Cette position a été cruciale dans l’évaluation par le Conseil d’État, qui a considéré que les décrets français ne respectaient pas les principes de liberté de circulation des marchandises et de marketing définis par l’Union européenne.

Raisonnement juridique derrière l’annulation

L’impact de l’arrêt de la CJUE

Le Conseil d’État, dans ses décisions du 28 janvier 2025, a suivi la logique de la CJUE en concluant que la réglementation française interdisant les termes comme « steaks de soja » et « saucisses végétales » était excessive. Le Conseil d’État a souligné qu’une telle interdiction était trop restrictive, d’autant plus que ces termes pouvaient être utilisés à condition qu’il y ait une mention claire précisant que les produits étaient végétaux. Cette décision vise à assurer une plus grande liberté pour les producteurs tout en préservant la transparence nécessaire pour les consommateurs.

Protection des consommateurs contre liberté des entreprises

Le Conseil d’État a estimé qu’il était possible de concilier la protection des consommateurs et la liberté commerciale des entreprises. Il a affirmé que l’usage de termes tels que « steaks » ou « saucisses » ne créait pas de confusion pour les consommateurs, à condition que l’étiquetage précise clairement que ces produits sont d’origine végétale. Cette solution permet d’éviter une réglementation trop rigide, qui pourrait nuire au développement du marché des produits végétaux tout en protégeant les consommateurs contre les abus.

Implications pour l’industrie alimentaire végétale

Plus de flexibilité pour les producteurs

L’annulation de l’interdiction ouvre de nouvelles perspectives pour les producteurs de produits végétaux. Ceux-ci peuvent désormais utiliser des termes comme « steaks de soja » et « saucisses végétales » dans leurs communications marketing sans crainte de sanctions. Cela leur permet de mieux répondre à la demande croissante de produits à base de plantes, qui est en plein essor en France et en Europe. Cette décision permet ainsi une plus grande liberté pour les producteurs tout en garantissant une information claire et non trompeuse pour les consommateurs.

Impact sur le comportement des consommateurs

Cette décision a également des implications directes sur les comportements des consommateurs. Elle garantit une meilleure lisibilité des produits végétaux sur le marché et facilite la transition vers des alternatives végétales en réduisant la confusion sur leur nature. Les consommateurs peuvent ainsi faire des choix éclairés tout en étant assurés de l’origine végétale des produits, ce qui est essentiel pour ceux qui optent pour des régimes végétariens ou véganes.

Conclusion

L’annulation des décrets interdisant les expressions « steaks de soja » et « saucisses végétales » par le Conseil d’État constitue une victoire pour l’industrie alimentaire végétale. En s’alignant sur la position de la CJUE, cette décision permet aux producteurs de mieux communiquer sur leurs produits tout en préservant la transparence pour les consommateurs. Elle souligne également l’importance de trouver un équilibre entre protection du consommateur, innovation des entreprises et respect des principes européens de liberté de marché.

Le cabinet Dreyfus et Associés accompagne les entreprises du secteur alimentaire en offrant des conseils spécialisés en propriété intellectuelle et en réglementation, afin de garantir leur conformité avec les législations nationales et européennes.

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FAQ

1. Pourquoi la France a-t-elle imposé une interdiction sur les termes « steaks de soja » et « saucisses végétales » ?

La France a imposé cette interdiction pour éviter toute confusion chez les consommateurs, estimant que ces termes pouvaient les induire en erreur en leur faisant croire que ces produits étaient à base de viande.

2. Quel est l'impact de l'arrêt de la CJUE sur l'étiquetage alimentaire en Europe ?

L'arrêt de la CJUE a souligné que les produits végétaux peuvent utiliser des termes alimentaires traditionnels, à condition que l'étiquetage indique clairement qu'il s'agit de produits à base de plantes, favorisant ainsi la liberté de marketing tout en protégeant les consommateurs.

3. Quel était le raisonnement juridique derrière la décision du Conseil d'État ?

La décision du Conseil d'État repose sur les principes européens de libre marché et de libre circulation des biens, ainsi que sur l'arrêt de la CJUE, qui autorise l’utilisation de termes alimentaires traditionnels pour les produits végétaux, sous réserve d’une mention claire de leur origine.

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Évolution jurisprudentielle concernant les marques déposées pour le compte d’une société en cours de formation : vers une simplification du formalisme

La protection d’une marque est essentielle pour toute entreprise, y compris celles en cours de formation. Le dépôt d’une marque au nom et pour le compte d’une société en formation soulève des questions juridiques complexes, notamment en matière de reprise des actes et de titularité des droits. Récemment, la jurisprudence française a évolué vers une simplification du formalisme requis pour ces actes.​

Contexte juridique des sociétés en formation

Définition et cadre légal

Une société en formation est une entité juridique en cours de constitution qui n’a pas encore acquis la personnalité morale, laquelle intervient à l’immatriculation au Registre du commerce et des sociétés (RCS). Durant cette période, les actes peuvent être accomplis par les fondateurs au nom et pour le compte de la future société. Ces actes pourront être repris par la société une fois immatriculée, conformément aux articles L. 210-6 et R. 210-6 du Code de commerce.​

Procédures de reprise des actes

La reprise des actes peut s’effectuer de trois manières :​

Par une mention dans les statuts de la société, annexant la liste des actes accomplis pour son compte.​

Par un mandat donné par les associés à l’un d’eux pour accomplir des actes déterminés.​

Par une décision prise par la société après son immatriculation, approuvant expressément les actes accomplis.​

Dépôt de marque pour une société en formation

Importance du dépôt anticipé

Déposer une marque avant l’immatriculation de la société permet de sécuriser le nom commercial et d’éviter que des tiers n’en prennent possession. Ce dépôt est généralement effectué par un fondateur agissant pour le compte de la société en cours de formation.​

Risques liés à l’absence de régularisation

Si, après l’immatriculation, la société ne procède pas à la régularisation du dépôt de marque, elle ne sera pas considérée comme titulaire de celle-ci. Cela signifie qu’elle ne pourra pas agir en contrefaçon ou défendre ses droits sur la marque. De plus, le fondateur ayant effectué le dépôt restera personnellement responsable.​

Évolution jurisprudentielle récente

Revirement de la Cour de cassation du 29 novembre 2023

Par trois arrêts rendus le 29 novembre 2023 (n°22-12.865, n°22-18.295 et n°22-21.623), la Cour de cassation a assoupli les conditions de reprise des actes accomplis pour le compte d’une société en formation. Auparavant, seuls les actes mentionnant expressément qu’ils étaient conclus « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation pouvaient être repris. Désormais, les juges peuvent apprécier la commune intention des parties, même en l’absence de telles mentions explicites.

Implications pour les sociétés en formation

Cette évolution facilite la reprise des actes et réduit le formalisme auparavant exigé. Les fondateurs disposent ainsi d’une plus grande flexibilité dans la gestion des actes préalables à l’immatriculation.​

Étude de cas : l’affaire « PROPULSE »

Dans une affaire récente, décision rendue par le tribunal judiciaire de Lyon le 1er octobre 2024 (n° 24/01144), une marque « PROPULSE » avait été déposée par une personne physique « agissant pour le compte de la société Submersive Drinks en cours de formation ». Après l’immatriculation, aucune démarche de transfert de la marque à la société n’a été effectuée. Lorsqu’une action en contrefaçon a été intentée, le tribunal a jugé la société irrecevable, car elle n’était pas titulaire de la marque. ​

Recommandations pratiques pour les entrepreneurs

Formaliser les actes : Même si la jurisprudence a assoupli les exigences, il est recommandé de préciser dans les actes qu’ils sont conclus « au nom et pour le compte de la société en formation ».

Annexer les actes aux statuts : Lister les actes accomplis pour le compte de la société en formation en annexe des statuts facilite leur reprise automatique après l’immatriculation.​

Effectuer les formalités post-immatriculation : Après l’immatriculation, procéder aux démarches nécessaires pour transférer officiellement la titularité de la marque à la société, notamment via une inscription modificative auprès de l’Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI).

Conclusion

L’évolution jurisprudentielle récente simplifie le formalisme lié aux actes accomplis pour le compte d’une société en formation, notamment en matière de dépôt de marque. Toutefois, une vigilance demeure nécessaire pour assurer la protection des droits de la société sur sa marque.

Le cabinet Dreyfus et Associés accompagne les entreprises du secteur alimentaire en offrant des conseils spécialisés en propriété intellectuelle et en réglementation, afin de garantir leur conformité avec les législations nationales et européennes.

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FAQ

1. Peut-on déposer une marque au nom d’une société qui n’est pas encore immatriculée ?

Oui, un fondateur peut déposer une marque « au nom et pour le compte d’une société en cours de formation ». Cette mention permet à la société, une fois immatriculée, de reprendre les droits sur cette marque à condition que des démarches de régularisation soient ensuite effectuées.

2. Qui est titulaire de la marque avant l’immatriculation de la société ?

Avant l’immatriculation, le déposant reste juridiquement titulaire de la marque, même s’il agit pour le compte de la société en formation. Ce n’est qu’après une reprise explicite (statutaire ou par décision) ou un transfert que la société devient titulaire des droits.

3. Que signifie « reprise des actes » par une société en formation ?

La reprise des actes correspond à la validation, par la société nouvellement immatriculée, des actes juridiques accomplis avant sa création. Cela permet à la société de se substituer juridiquement à la personne qui a agi pour son compte.

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La réforme du droit des dessins et modèle de l’Union Européenne : évolutions clés et recommandations stratégiques pour les titulaires de droits.

La réforme du droit des dessins et modèles, introduite par le Règlement (UE) 2024/2822 et la Directive (UE) 2024/2823, marque une avancée majeure dans la protection des créations industrielles. Mise en œuvre à compter du 1er mai 2025, avec une transposition complète attendue pour le 9 décembre 2027, cette réforme redéfinit les règles de protection, de gestion et d’exécution des droits sur les dessins dans toute l’Union.

La réforme et ses impacts stratégiques

Le nouveau cadre juridique européen introduit :

  • Des définitions modernisées, incluant les dessins animés et numériques
  • Une flexibilité procédurale accrue (dépôts multiples, différés)
  • Des mécanismes renforcés de mise en œuvre pour les atteintes physiques et numériques
  • Des motifs harmonisés de refus et de nullité
  • Une structure tarifaire rééquilibrée en faveur des PME
  • Une clarification des règles de titularité, en lien avec le droit du travail
  • Une meilleure lisibilité du régime des dessins non enregistrés et de la clause de réparation

Les titulaires de droits sont invités à auditer leur portefeuille, revoir leurs contrats de travail et adapter leur stratégie de dépôt.

Calendrier de mise en œuvre et dates clés

  • 1er mai 2025 : entrée en vigueur du Règlement (phase I)
  • 1er juillet 2026 : mise en œuvre des dispositions secondaires (phase II)
  • 9 décembre 2027 : transposition complète de la Directive par les Etats membres
  • 9 décembre 2032 : fin de la période transitoire pour les pièces détachées

Extension du champ de protection des dessins

A – Dessins numériques et immatériels

Sont désormais inclus les interfaces graphiques, objets virtuels et configurations spatiales dans les environnements virtuels. Une évolution en phase avec les marchés du jeu vidéo, du métavers et des services numériques.

B – Eléments animés et virtuels

Les dessins intégrant des mouvements ou transitions sont protégés : animations d’applications, effets dynamiques de sites web, vêtements virtuels, etc.

Innovations procédurales en matière de dépôt

A – Dépôts simplifiés de dessins multiples

Jusqu’à 50 dessins peuvent être déposés dans une seule demande, sans contrainte de classification commune.

B – Représentation visuelle et exigences de dépôt

Seules les caractéristiques visibles dans la demande sont protégées, tranchant un débat jurisprudentiel. La demande doit comporter l’identité du déposant, une représentation claire et l’indication du produit visé.

C – Déféré de publication harmonisé

La publication peut être différée de 30 mois maximum, avec possibilité d’opposition au plus tard 3 mois avant la fin du délai.

Renforcement des droits et des outils de mise en œuvre

A – Impression 3D et fichiers numériques

Le titulaire peut interdire le partage ou l’utilisation non autorisée de fichiers numériques permettant la reproduction 3D de son dessin.

B – Lutte contre la contrefaçon en transit

Les droits peuvent s’exercer même contre des produits en simple transit dans l’UE, à l’instar du droit des marques.

C – Procédures accélérées d’annulation

L’EUIPO pourra accélérer les procédures d’annulation non contestées, pour une exécution plus rapide.

Clarification de la titularité et relations de travail

Par défaut, la titularité revient au créateur ou son ayant droit, sauf création dans le cadre d’un emploi, auquel cas le salarié cède automatiquement le droit à l’employeur. Le contrat ou la législation nationale peut prévoir autrement.

Impact financier et nouvelle structure tarifaire

La réforme introduit une révision complète de la structure tarifaire applicable aux dessins et modèles de l’Union. Si certaines taxes initiales sont allégées, notamment au stade du dépôt (à titre d’exemple, le coût de dépôt d’un dessin passe de 350 € à 250 €), les coûts augmentent sensiblement à partir du troisième renouvellement.

Cette évolution favorise les PME et les secteurs à cycles de vie courts (comme la mode, les accessoires ou les produits numériques), en allégeant les coûts initiaux de dépôt et en simplifiant les démarches. En revanche, elle pourrait désavantager les industries à long cycle de vie, telles que l’automobile, l’électroménager ou l’ingénierie lourde, pour lesquelles la pérennité de la protection sur 20 à 25 ans est essentielle. Pour ces entreprises, la montée en puissance des frais de renouvellement impose une réelle anticipation budgétaire et stratégique.

Motifs harmonisés de refus et de nullité

Motifs optionnels de refus si le dessin :

  • Reproduit des éléments du patrimoine culturel national (monuments, costumes)
  • Utilise de façon abusive des emblèmes ou signes d’intérêt public

Régime clarifié des dessins non enregistrés

La protection des dessins divulgués hors UE est désormais possible, s’ils peuvent raisonnablement atteindre le public concerné dans l’Union. Une évolution en phase avec la diffusion numérique internationale.

La nouvelle clause de réparation et ses implications

Applicable dès le 9 décembre 2027, cette clause autorise la reproduction de composants destinés à restaurer l’apparence d’origine d’un produit complexe.

  • Conditions strictes : usage exclusivement réparatoire et indication de l’origine
  • Non applicable aux marques ni aux éléments non visuels essentiels

Cette mesure favorise la concurrence et l’économie circulaire, mais soulève des enjeux juridiques.

Sécurité juridique renforcée et liberté créative

Sont désormais autorisés dans des conditions équitables :

  • Publicité comparative
  • Critique, commentaire
  • Parodie

Ces exceptions visent à garantir la liberté d’expression et une transparence du marché.

Recommandations pour les entreprises

Il est conseillé de :

  • Auditer les portefeuilles et échéances afin de repérer les modèles à renouveler ou à consolider, en tenant compte de la nouvelle grille tarifaire plus lourde à long terme.
  • Mettre à jour les contrats de travail sur la titularité, en particulier pour les salariés susceptibles de créer des dessins ou modèles dans le cadre de leurs fonctions. En effet, la réforme confirme que, par défaut, les droits appartiennent au créateur, sauf clause contraire ou disposition nationale spécifique. Une clause contractuelle claire évite tout litige futur sur la propriété des droits et renforce la sécurité juridique de l’entreprise en cas de contentieux ou de cession de droits.
  • Toujours examiner, au cas par cas, s’il est plus avantageux d’opter pour un dépôt international via le système de La Haye ou pour un dépôt communautaire, selon les pays cibles, les perspectives d’exploitation et les contraintes budgétaires.

Conclusion

Cette réforme modernise le droit des dessins de l’UE à l’ère numérique, simplifie les procédures et favorise l’innovation. Elle nécessite néanmoins une adaptation stratégique des titulaires de droits.

Le cabinet Dreyfus & Associés accompagne les entreprises pour sécuriser et valoriser leurs créations dans ce nouveau cadre.

Le cabinet Dreyfus et Associés est en partenariat avec un réseau mondial d’avocats spécialisés en Propriété Intellectuelle.

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FAQ

1 – Quels sont les droits des dessins et modèles enregistrés dans l’UE ?
Un dessin ou modèle enregistré dans l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif d’exploitation sur l’apparence du produit ou d’une partie de produit résultant de ses caractéristiques visuelles (lignes, contours, formes, textures, matériaux ou ornementations). Ce droit permet d’interdire à tout tiers non autorisé de fabriquer, offrir, mettre sur le marché, importer, exporter ou utiliser un produit incorporant le dessin ou modèle, ou de détenir un tel produit à ces fins. La protection est valable dans l’ensemble des États membres de l’UE pour une période de 5 ans renouvelable par tranches quinquennales, jusqu’à un maximum de 25 ans.

2 – Est il possible de transmettre un dessin ou modèle
Oui. Le droit sur un dessin ou modèle enregistré constitue un actif immatériel cessible, qui peut être transmis à titre onéreux (vente, apport en société) ou gratuit (donation, succession). La transmission peut également résulter d’une fusion ou d’une scission d’entreprise. Pour assurer l’opposabilité aux tiers, l’enregistrement de la cession au registre des dessins et modèles tenu par l’EUIPO (ou par l’office national compétent en cas de dessin national) est recommandé. Il est également possible de conclure une licence d’exploitation exclusive ou non exclusive.

3 – Où doit on déposer un dessin ou modèle pour l’Europe ?
Pour une protection à l’échelle de l’Union européenne, il convient de déposer une demande de dessin ou modèle communautaire enregistré (DMC ou RCD) auprès de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO). Cette procédure unique permet d’obtenir une protection valable dans les 27 États membres. Il est également possible de désigner l’UE dans le cadre d’un dépôt international via le Système de La Haye géré par l’OMPI, pratique pour une stratégie multi-pays. Enfin, des dépôts peuvent être effectués au niveau national pour des besoins spécifiques ou en complément d’un DMC.

4 – Quelle est la différence entre un dessin et un modèle ?
En droit de l’Union européenne, les termes « dessin » et « modèle » sont utilisés de manière interchangeable pour désigner la protection de l’apparence extérieure d’un produit. Toutefois, en pratique ou dans d’autres législations (notamment en droit français), on peut distinguer :

  • Un dessin, qui vise une représentation en deux dimensions (motif, ornement, interface graphique) ;
  • Un modèle, qui couvre une forme en trois dimensions (objet, emballage, produit manufacturé).
    Dans les deux cas, la protection s’attache à l’esthétique du produit, et non à sa fonction technique.
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Thaler c. Perlmutter : la confirmation du principe d’une paternité humaine en droit d’auteur

Le 18 mars 2025, la Cour d’appel fédérale du District de Columbia a rendu une décision attendue dans l’affaire Thaler c. Perlmutter, réaffirmant qu’une œuvre non créée par un être humain ne peut bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur. Cette décision revêt une importance considérable pour les professionnels de la propriété intellectuelle à l’ère de l’intelligence artificielle (IA).

Introduction

La montée en puissance de l’intelligence artificielle suscite des transformations majeures dans le domaine de la création, mais aussi de profondes interrogations juridiques. Peut-on encore parler de « création » au sens du droit d’auteur lorsque l’œuvre est issue d’un processus autonome piloté par une machine ? La décision Thaler c. Perlmutter permet de répondre clairement à cette interrogation : seul un être humain peut être considéré comme auteur au sens du Copyright Act américain.

Contexte et faits de l’affaire

Le requérant, Dr Stephen Thaler, est un chercheur spécialisé dans le développement de systèmes d’intelligence artificielle. Il a conçu un programme de génération autonome dénommé The Creativity Machine, capable de produire des œuvres originales sans intervention humaine directe. En mai 2019, il a soumis une demande d’enregistrement pour une image intitulée A Recent Entrance to Paradise, en désignant la machine comme auteur unique de l’œuvre.

Procédure et moyens soulevés

A – Demande initiale et rejet

La Copyright Office a rejeté la demande, se fondant sur un principe bien établi : une œuvre doit émaner d’un être humain pour bénéficier de la protection du droit d’auteur. La Compendium of U.S. Copyright Office Practices, qui fait foi en la matière et qui est un manuel produit par le US Copyright Office, exclut expressément l’enregistrement d’œuvres créées « automatiquement sans intervention humaine ».

B – Procédure devant la juridiction de première instance

Dr Thaler a contesté ce rejet devant la cour fédérale du District de Columbia. Il a invoqué l’absence de définition explicite du mot « auteur » dans la loi et a plaidé pour une interprétation évolutive tenant compte de l’IA. Le tribunal a confirmé la décision de l’Office, réaffirmant que la paternité humaine constitue un fondement indissociable du droit d’auteur.

C – Recours devant la Cour d’appel

En appel, les arguments de fond ont été reconduits : Dr Thaler soutenait que le terme « auteur » pouvait inclure une machine autonome. Il arguait également de la doctrine du « work made for hire » pour revendiquer la titularité, en qualité de concepteur de la machine.

Analyse juridique de la Cour

A – Interprétation du terme « auteur » en droit américain

La Cour d’appel a procédé à une interprétation stricte du Copyright Act, dans sa version de 1976. Plusieurs dispositions démontrent que le législateur visait uniquement les personnes physiques :

  • Le droit d’auteur naît automatiquement au bénéfice de l’auteur, notion juridique incompatible avec les machines.
  • La durée des droits dépend de la vie de l’auteur (+70 ans), notion inapplicable à un système d’IA.
  • Les dispositions sur la transmission héréditaire (époux, enfants, petits-enfants) confortent cette approche anthropocentrique.
  • Les actes de cession nécessitent une signature, que ne peut produire un système algorithmique.

En complément, la jurisprudence antérieure (Burrow-Giles, Naruto, Kelley) et les travaux de la Commission CONTU (Commission on New Technological Uses of Copyrighted Works) confirment cette interprétation constante

B – Rejet des arguments en faveur de la titularité non humaine

La Cour a écarté l’argument selon lequel la machine serait une sorte d’« employé » au sens du work made for hire. Cette doctrine suppose l’existence d’un contrat et d’un lien de subordination entre une personne morale ou physique et un créateur humain. Aucune analogie valable ne permettait ici de transposer ce cadre à une entité algorithmique.

Conséquences pour les œuvres générées par l’IA

A – La nécessité d’une implication humaine directe

La décision ne ferme pas la porte à l’enregistrement d’œuvres assistées par l’IA. Elle exige simplement que l’élément original protégé émane d’un apport créatif humain identifiable. Les directives de l’USPTO et du Copyright Office vont dans ce sens : tout dépend du rôle actif de l’utilisateur dans la production.

B – Perspectives d’évolution du droit

À mesure que l’IA générative gagne en autonomie, la frontière entre outil et auteur devient plus floue. Toutefois, seule une intervention législative pourrait permettre une extension du champ de la protection à des entités non humaines. Les débats sont ouverts, tant au Congrès qu’au sein du Copyright Office (rapports de 2024 et 2025 sur les deepfakes, digital replicas, etc.).

Conclusion

La décision Thaler c. Perlmutter consacre un principe fondamental : l’auteur doit être humain. Cela garantit la cohérence du système juridique actuel et préserve la philosophie originelle du droit d’auteur, fondée sur la reconnaissance de l’effort intellectuel individuel.

Besoin de conseils d’experts en intelligence artificielle et propriété intellectuelle ? Le cabinet Dreyfus & Associés est spécialisé en droit de la propriété intellectuelle, notamment en matière de marques, de droits d’auteur et de questions juridiques liées à l’IA. Nos experts suivent de près les évolutions du droit en matière d’IA et de propriété intellectuelle !

Dreyfus & Associés collabore avec un réseau mondial d’avocats spécialisés propriété intellectuelle afin d’offrir des solutions juridiques sur mesure dans le domaine en constante évolution de l’IA et du droit d’auteur.

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FAQ

1 – Est-ce que l’IA a des droits d’auteur ?
Non. En l’état actuel du droit, tant aux États-Unis qu’en France et dans la majorité des juridictions internationales, l’intelligence artificielle ne peut pas être titulaire de droits d’auteur. Le droit d’auteur est exclusivement réservé aux personnes physiques, c’est-à-dire aux êtres humains ayant exprimé une création originale. La jurisprudence récente (Thaler v. Perlmutter, 2025) a réaffirmé cette exigence : une œuvre générée de manière autonome par une IA n’est pas protégeable, faute d’auteur humain identifiable. Les machines sont considérées comme de simples outils au service de la création, et non comme des sujets de droit.

2 – Pourquoi l’IA menace-t-elle le droit d’auteur ?
L’intelligence artificielle remet en cause certains fondements du droit d’auteur, notamment l’originalité, la titularité et la responsabilité juridique. Lorsqu’une œuvre est générée sans intervention humaine significative, il devient difficile de déterminer si elle peut être protégée, et si oui, au bénéfice de qui. De plus, les IA peuvent être entraînées à partir de données protégées sans autorisation, ce qui soulève des risques de contrefaçon massive, de désintermédiation des créateurs et d’appauvrissement des ayants droit. Enfin, la prolifération de contenus générés automatiquement pose un défi considérable à l’identification et à la protection des œuvres humaines authentiques.

3 – Quel est l’impact de l’intelligence artificielle sur le droit ?
L’intelligence artificielle constitue à la fois un défi et une opportunité pour les systèmes juridiques. Son impact se manifeste à plusieurs niveaux :

  • En droit de la propriété intellectuelle, elle oblige les praticiens à redéfinir les contours de la création, de la titularité et de l’originalité.
  • En droit des contrats, elle soulève des questions sur la validité des accords générés ou négociés par des agents autonomes.
  • En matière de responsabilité, elle interpelle les systèmes sur l’attribution de la faute en cas de dommages causés par une IA.
  • En matière de protection des données, elle interagit fortement avec les régimes de privacy et de régulation algorithmique.

Les systèmes juridiques devront s’adapter en profondeur, sans pour autant renoncer à leurs principes fondamentaux, afin de garantir un encadrement efficace et équitable du développement technologique.

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The Thomson Reuters Enterprise Centre GmbH and West Publishing Corp. v. Ross Intelligence Inc. Case: Enjeux juridiques et impact sur l’entraînement des IA

Thomson Reuters Enterprise Centre GmbH et al v. ROSS Intelligence Inc., Docket No. 1:20-cv-00613 

Dans un contexte où l’intelligence artificielle (IA) bouleverse les industries, la question de l’utilisation d’œuvres protégées par le droit d’auteur pour entraîner ces systèmes devient un enjeu majeur. L’affaire Thomson Reuters Enterprise Centre GmbH et West Publishing Corp. v. Ross Intelligence Inc. du 11 février 2025 illustre ce débat à travers une confrontation entre un éditeur de bases de données juridiques et une startup spécialisée en IA juridique. Ce litige met en lumière des interrogations cruciales sur la portée du droit d’auteur et sur l’application du fair use dans le domaine de l’intelligence artificielle.

Contexte de l’affaire

Les parties impliquées

  • Thomson Reuters Enterprise Centre GmbH et West Publishing Corp. sont des fournisseurs majeurs de services d’information juridique, notamment à travers leur plateforme Westlaw, qui propose des analyses et commentaires juridiques enrichis.
  • Ross Intelligence Inc., une startup spécialisée en IA, cherchait à révolutionner la recherche juridique en utilisant l’intelligence artificielle pour analyser et extraire des informations juridiques de manière plus efficace.

La nature du litige

Thomson Reuters a intenté une action en justice contre Ross Intelligence, alléguant que cette dernière avait copié des headnotes et d’autres annotations éditoriales de Westlaw pour entraîner son IA, sans autorisation. Ces headnotes, qui synthétisent des décisions judiciaires, sont une valeur ajoutée importante de Westlaw. Ross Intelligence a contesté ces accusations en invoquant l’exception du fair use, estimant que son utilisation relevait d’un usage légitime et non d’une violation du droit d’auteur.

Les questions juridiques soulevées

Les allégations de contrefaçon de droit d’auteur

Thomson Reuters a soutenu que :

  • Les headnotes et annotations de Westlaw étaient protégées par le droit d’auteur en tant que créations originales.
  • Ross Intelligence avait copié ces contenus sans autorisation pour alimenter et entraîner son modèle d’IA.
  • L’acte de reproduction et d’exploitation de ces contenus ne relevait pas d’un usage transformatif et constituait donc une contrefaçon.

La défense du fair use

Ross Intelligence a avancé plusieurs arguments :

  • L’utilisation de ces données servait à développer une IA permettant une recherche juridique plus efficace, ce qui pourrait être considéré comme un usage transformatif.
  • L’entraînement de l’IA ne reproduisait pas les headnotes à l’identique, mais permettait d’en extraire des tendances et des concepts.
  • Le marché des services juridiques étant dominé par des acteurs comme Westlaw, restreindre l’accès à ces informations limiterait l’innovation et la concurrence.

Analyse et décision du tribunal

Évaluation des droits d’auteur

Le tribunal a examiné si les headnotes et annotations de Westlaw constituaient des œuvres protégées par le droit d’auteur. Il a été reconnu que ces résumés de jurisprudence n’étaient pas de simples retranscriptions, mais des créations originales nécessitant un travail éditorial substantiel.

Appréciation du fair use

Le tribunal a analysé les quatre critères du fair use aux États-Unis :

  1. Finalité et nature de l’utilisation : Ross Intelligence a prétendu que son utilisation était transformatrice, mais le tribunal a estimé que cette transformation n’était pas suffisante.
  2. Nature de l’œuvre protégée : Les headnotes sont des œuvres créatives et protégées.
  3. Quantité et importance de l’extrait utilisé : Ross Intelligence aurait utilisé une part significative des contenus protégés.
  4. Impact sur le marché : L’usage par Ross Intelligence pouvait nuire au modèle économique de Westlaw en permettant à d’autres acteurs d’exploiter des données protégées.

En conclusion, le tribunal a rejetté la défense de fair use, estimant que l’entraînement de l’IA sur des contenus protégés constituait bien une contrefaçon.

Implications pour l’intelligence artificielle et le droit d’auteur

Impact sur les pratiques d’entraînement des IA

Cette décision pourrait redéfinir les règles d’utilisation des œuvres protégées dans l’entraînement des IA, en particulier dans les secteurs où la donnée est essentielle, comme le droit, la finance ou la médecine. Les startups et entreprises développant des IA devront négocier des licences ou explorer des solutions basées sur des données libres de droits.

Considérations juridiques futures

Ce jugement s’inscrit dans une tendance plus large visant à clarifier les limites de l’utilisation des œuvres protégées dans l’IA. À l’avenir, il sera crucial pour les entreprises du secteur d’anticiper ces risques juridiques et d’adopter des stratégies conformes aux législations en vigueur.

Conclusion

L’affaire Thomson Reuters v. Ross Intelligence marque un tournant dans la reconnaissance du droit d’auteur face aux nouvelles technologies. En refusant l’exception du fair use, la décision protège les éditeurs de contenus et impose aux développeurs d’IA de revoir leurs pratiques d’acquisition de données. Pour les acteurs du droit et de l’intelligence artificielle, cette affaire constitue une mise en garde sur les risques liés à l’exploitation de données protégées.

Besoin de conseils d’experts en intelligence artificielle et propriété intellectuelle ? Le cabinet Dreyfus & Associés est spécialisé en droit de la propriété intellectuelle, notamment en matière de marques, de droits d’auteur et de questions juridiques liées à l’IA. Nos experts suivent de près les évolutions du droit en matière d’IA et de propriété intellectuelle !

Dreyfus & Associés collabore avec un réseau mondial d’avocats spécialisés propriété intellectuelle.

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FAQ – Questions fréquentes

  1. Pourquoi l’entraînement d’une IA sur des contenus protégés peut-il poser problème ?
    L’utilisation d’œuvres protégées sans autorisation peut être considérée comme une contrefaçon, sauf si elle entre dans le cadre d’une exception légale comme le fair use.
  2. En quoi l’affaire Thomson Reuters v. Ross Intelligence est-elle importante ?
    Elle clarifie que l’entraînement d’une IA avec des données protégées peut constituer une violation du droit d’auteur, remettant en cause certaines pratiques courantes.
  3. Une IA peut-elle générer du contenu protégé sans être en infraction ?
    Cela dépend de la manière dont elle est entraînée et du niveau de reproduction des œuvres existantes.
  4. Quelles alternatives pour entraîner une IA légalement ?
    Utiliser des données en open source, sous licence ou négocier des accords d’exploitation avec les titulaires de droits.
  5. Cette décision s’applique-t-elle en Europe ?
    Non, mais elle pourrait influencer les débats sur l’application du droit d’auteur à l’intelligence artificielle au sein de l’Union européenne.
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Derniers développements en matière d’IA générative et de droit d’auteur : Une analyse approfondie

L’évolution rapide de l’intelligence artificielle générative (IA) transforme profondément la création et l’exploitation des contenus, soulevant des questions complexes en matière de droit d’auteur. Cet article propose une synthèse complète des récentes actions en justice et initiatives législatives en lien avec l’IA générative et le droit d’auteur, en mettant en lumière les défis et opportunités dans ce paysage juridique en pleine mutation.

Actions en justice récentes aux États-Unis

Aux États-Unis, plusieurs recours ont été engagés à l’encontre de sociétés technologiques pour l’utilisation présumée d’œuvres protégées par le droit d’auteur dans l’entraînement de modèles d’IA générative.

Affaire Kadrey c. Meta

Dans cette action collective, les auteurs Richard Kadrey, Sarah Silverman et Christopher Golden accusent Meta Platforms Inc. d’avoir violé leurs droits d’auteur en utilisant leurs ouvrages pour entraîner son modèle d’IA, LLaMA (Large Language Model Meta AI).
Le 20 novembre 2023, le tribunal fédéral du district nord de Californie a rejeté plusieurs chefs de demande, notamment ceux fondés sur la création d’œuvres dérivées et la contrefaçon indirecte. Toutefois, le tribunal a jugé recevables les demandes fondées sur la suppression d’informations de gestion des droits d’auteur, au titre du Digital Millennium Copyright Act (DMCA), estimant que les demandeurs avaient démontré un préjudice suffisant pour fonder leur intérêt à agir au sens de l’article III de la Constitution.
Le 10 mars 2025, les plaignants ont déposé une requête en jugement partiel concernant la contrefaçon directe, faisant valoir que Meta ne pouvait se prévaloir de l’exception de fair use pour justifier l’acquisition présumée de « millions d’œuvres piratées » utilisées pour l’entraînement de son modèle.

Procédures contre OpenAI et Microsoft

En décembre 2023, le New York Times a assigné OpenAI et Microsoft, les accusant d’avoir entraîné leurs modèles d’IA sur les articles du journal sans autorisation, ce qui constituerait une violation des droits d’auteur.
Cette affaire illustre les tensions croissantes entre les créateurs de contenu et les développeurs d’IA concernant l’utilisation non autorisée d’œuvres protégées dans l’entraînement des modèles. En mars 2025, un juge fédéral a autorisé l’affaire à se poursuivre, rejetant certaines allégations mais maintenant les griefs centraux de contrefaçon de droit d’auteur.

Évolutions juridiques internationales

Les contentieux liés à l’IA générative et au droit d’auteur se multiplient également à l’échelle internationale.

Action en justice en France contre Meta

En France, trois associations représentant les auteurs et les éditeurs, le Syndicat National de l’Édition (SNE), la Société des Gens de Lettres (SGDL) et le Syndicat National des Auteurs et des Compositeurs (SNAC),  ont engagé une action contre Meta.
Elles reprochent à Meta d’avoir utilisé des œuvres protégées sans autorisation pour entraîner son modèle d’IA générative.
Il s’agit de la première action judiciaire de ce type en France, visant à faire respecter les droits d’auteur et à obtenir le retrait complet des bases de données utilisées pour l’entraînement des IA.

Initiatives législatives et réglementaires

Face à ces enjeux, plusieurs textes ont été proposés ou adoptés pour encadrer l’usage de l’IA générative.

États-Unis : Generative AI Copyright Disclosure Act

En avril 2024, le représentant américain Adam Schiff a présenté le Generative AI Copyright Disclosure Act.
Ce projet de loi impose aux entreprises de déclarer les œuvres protégées utilisées pour entraîner leurs systèmes d’IA générative, en adressant un avis au Copyright Office au moins 30 jours avant la mise à disposition d’un modèle (nouveau ou mis à jour).
Les sanctions en cas de non-respect débutent à 5 000 USD, sans plafond de pénalité prévu.

Union européenne : AI Act

Au sein de l’Union européenne, l’AI Act a été adopté par le Parlement européen le 13 mars 2024, à la suite d’un accord politique intervenu le 8 décembre 2023. Ce règlement inédit encadre l’usage des systèmes d’intelligence artificielle à différents niveaux de risque.

Concernant les modèles d’IA générative, le texte impose aux développeurs d’IA généralistes (notamment génératives) de fournir une documentation détaillée sur les données utilisées pour l’entraînement, précisant notamment si celles-ci incluent des œuvres protégées.
Une obligation de transparence vise ainsi à permettre aux titulaires de droits de connaître l’usage éventuel de leurs œuvres.

Par ailleurs, le règlement impose l’étiquetage clair des contenus générés par l’IA, afin de permettre aux consommateurs et aux ayants droit d’identifier ces productions non humaines.

Ces dispositions traduisent la volonté de l’Union européenne de concilier protection de la propriété intellectuelle et promotion de l’innovation technologique, dans un contexte de tensions croissantes entre créateurs et développeurs.

Conclusion

L’articulation entre IA générative et droit d’auteur constitue un domaine en pleine évolution, marqué par des actions judiciaires majeures et des initiatives législatives d’ampleur.
À mesure que les technologies progressent, il devient essentiel pour tous les acteurs — développeurs, créateurs, juristes — de rester informés et proactifs pour naviguer efficacement dans ce cadre juridique complexe.

Questions fréquentes (FAQs)

Qu’est-ce que l’IA générative ?
L’IA générative désigne des systèmes capables de produire du contenu (texte, image, musique, etc.) à partir de modèles entraînés sur de vastes ensembles de données existantes.

Pourquoi l’IA générative soulève-t-elle des préoccupations en matière de droit d’auteur ?
Les modèles d’IA sont souvent entraînés sur des données contenant des œuvres protégées. Leur utilisation sans autorisation peut constituer une violation des droits d’auteur.

Qu’est-ce que le Generative AI Copyright Disclosure Act ?
Il s’agit d’un projet de loi américain qui impose aux entreprises de révéler les œuvres protégées utilisées pour entraîner leurs IA génératives, afin d’accroître la transparence et de protéger les droits des créateurs.

Comment l’Union européenne traite-t-elle les enjeux IA et droit d’auteur ?
L’AI Act européen prévoit des obligations de transparence sur les données utilisées et impose un étiquetage des contenus générés par l’IA, afin de mieux encadrer l’usage des œuvres protégées.

Que doivent prendre en compte les entreprises développant des modèles d’IA générative ?
Elles doivent s’assurer de disposer des droits nécessaires ou de licences sur les données utilisées pour l’entraînement, et suivre l’évolution des exigences juridiques pour limiter les risques de contrefaçon.


Le cabinet Dreyfus est spécialisé en droit de la propriété intellectuelle et accompagne ses clients dans la compréhension et l’anticipation des problématiques juridiques liées à l’intelligence artificielle et au droit d’auteur.

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Le troisième projet de Code de bonnes pratiques pour l’IA à usage général : objectifs et perspectives d’avenir

L’évolution rapide des technologies d’intelligence artificielle (IA) a rendu indispensable l’élaboration de cadres réglementaires garantissant leur utilisation éthique et responsable. Dans ce contexte, la Commission européenne a publié le troisième projet de Code de bonnes pratiques pour l’IA à usage général, visant à guider les fournisseurs de modèles d’IA dans la mise en conformité avec l’IA Act européenrèglement (UE) 2024/1689). Cet article examine les objectifs clés de ce projet et explore ses implications pour l’avenir.

I – Objectifs du troisième projet de Code de bonnes pratiques pour l’IA à usage général

A – Renforcer la transparence

L’un des piliers de ce projet est l’exigence de transparence. Les fournisseurs de modèles d’IA à usage général devront divulguer des informations essentielles sur leurs modèles, notamment les spécifications techniques, les sources des données d’entraînement et les applications prévues.

Cette initiative vise à renforcer la confiance des utilisateurs et des parties prenantes en leur fournissant une meilleure compréhension des capacités et des limites des systèmes d’IA. Toutefois, certains modèles open source bénéficieront d’exemptions spécifiques, illustrant une approche plus nuancée pour prendre en compte les différentes méthodes de développement de l’IA.

B – Prendre en compte les enjeux de droits d’auteur

Le projet de code aborde également une question cruciale : la protection des droits de propriété intellectuelle dans le développement de l’IA.

Les fournisseurs devront mettre en place des mécanismes de conformité pour éviter toute violation des droits d’auteur par leurs modèles. Ils devront également offrir des procédures de signalement permettant aux titulaires de droits d’alerter sur des potentielles infractions.

Toutefois, le texte prévoit que les fournisseurs pourront refuser de traiter des plaintes manifestement infondées ou excessives, notamment si elles sont répétitives. Cette disposition cherche à prévenir un abus de procédures tout en garantissant une protection effective des créateurs.

C – Garantir la sécurité et la sûreté

Les modèles d’IA présentant des risques systémiques feront l’objet d’obligations supplémentaires en matière de sécurité et de sûreté.

Les fournisseurs devront réaliser des évaluations de risques approfondies, mettre en œuvre des stratégies d’atténuation robustes et établir des protocoles de signalement d’incidents.

Ces mesures visent à prévenir d’éventuelles dérives et à garantir une utilisation éthique et sécurisée des systèmes d’IA avancés.

II – Perspectives d’avenir du Code de bonnes pratiques pour l’IA à usage général

A – Défis de mise en œuvre

L’application de ce Code de bonne pratique soulève plusieurs défis, notamment la complexité pour les fournisseurs d’adapter leurs processus de développement afin de se conformer aux exigences du Code.

L’un des enjeux majeurs sera d’équilibrer innovation et régulation, en garantissant une conformité rigoureuse sans freiner l’évolution technologique de l’IA.

B – Influence mondiale et harmonisation

Le Code pourrait devenir une référence mondiale en matière de gouvernance de l’IA.

En établissant des lignes directrices détaillées, la Commission européenne espère influencer les normes internationales et encourager une harmonisation des réglementations au niveau mondial.

En parallèle, les présidents et vice-présidents du groupe de travail sur ce projet ont annoncé la création d’un résumé exécutif dédié et d’un site interactif pour favoriser les retours des parties prenantes à travers des commentaires écrits et des discussions en groupe.

La version finale du Code est attendue en mai 2025 et servira de cadre de conformité pour les fournisseurs de modèles d’IA à usage général, en intégrant les meilleures pratiques du secteur.

C – Evolution et adaptation continues

Compte tenu de l’évolution rapide des technologies d’IA, le Code a été conçu pour être adaptable.

Il met l’accent sur l’évolution continue, permettant des mises à jour régulières afin d’intégrer les avancées technologiques et les nouvelles préoccupations éthiques.

Cette flexibilité garantit que le Code demeure un outil pertinent pour encadrer le développement de l’IA de manière responsable.

Conclusion

Le troisième projet de Code de bonnes pratiques pour l’IA à usage général constitue une étape majeure vers une régulation responsable de l’intelligence artificielle.

En mettant l’accent sur la transparence, le respect du droit d’auteur et la sécurité, il pose les bases d’un développement éthique de l’IA.

À mesure que ce cadre progresse vers sa version finale, sa mise en œuvre réussie dépendra de l’engagement des parties prenantes pour relever les défis et favoriser une harmonisation mondiale des pratiques en matière d’IA.

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FAQ

1 – C’est quoi l’IA Act ?

L’IA Act (ou Règlement européen sur l’intelligence artificielle) est une législation proposée par la Commission européenne visant à réglementer l’usage et le développement des systèmes d’intelligence artificielle au sein de l’Union européenne. Il s’agit du premier cadre juridique complet au monde dédié à l’IA, visant à équilibrer innovation et protection des droits fondamentaux. Ce texte classe les systèmes d’IA en quatre niveaux de risque : • Risque inacceptable (interdit, comme les systèmes de notation sociale ou de manipulation subliminale) • Risque élevé (soumis à des obligations strictes, comme les systèmes d’IA utilisés dans les infrastructures critiques, le recrutement ou la justice) • Risque limité (nécessitant des obligations de transparence, comme les chatbots ou deepfakes) • Risque minimal (sans obligations particulières, comme les systèmes de recommandation de contenu) Le but principal est de garantir que les systèmes d’IA déployés en Europe respectent les droits fondamentaux, la sécurité et la transparence tout en favorisant l’innovation responsable.

2 – Quand entrera en vigueur l’IA Act ?

L’IA Act a été adopté en accord provisoire en 2024, et son entrée en vigueur est prévue en 2025, après son approbation définitive par le Parlement européen et le Conseil de l’Union Européenne. Toutefois, son application sera progressive : • Certaines dispositions immédiates entreront en vigueur six mois après la publication. • Les règles pour les systèmes à risque élevé entreront en vigueur à partir de 2026. • D’autres obligations spécifiques, comme celles liées aux modèles d’IA à usage général, pourraient être mises en œuvre jusqu’en 2027. Ainsi, les entreprises auront un délai pour adapter leurs pratiques à cette nouvelle réglementation.

3 – Quel est le cadre juridique de l’IA ?

Le cadre juridique de l’IA repose actuellement sur un ensemble de règles européennes et nationales couvrant divers aspects : 1. L’IA Act (bientôt en vigueur) qui encadrera spécifiquement l’usage et la commercialisation des IA. 2. Le RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), qui régit l’utilisation des données personnelles, un enjeu majeur pour les systèmes d’IA. 3. La directive sur la responsabilité du fait des produits (Directive 85/374/CEE) et la future directive sur la responsabilité en matière d’IA (Commission européenne, 28 septembre 2022 (2022/0302 (COD)), qui définissent la responsabilité des concepteurs et utilisateurs d’IA en cas de dommages causés. 4. Les lois sectorielles (ex : finance, santé) qui imposent des normes spécifiques aux systèmes d’IA dans ces domaines. 5. Les réglementations nationales et européennes sur le droit d’auteur, qui impactent les bases de données d’entraînement des IA génératives (ex : respect des droits d’auteur sur les œuvres utilisées par les modèles). Ce cadre juridique est en évolution constante, avec un objectif de protéger les utilisateurs et encourager une IA éthique.

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La CJUE neutralise la règle de réciprocité de l’article 2, §7 de la Convention de Berne pour les œuvres ayant pour origine un pays tiers à l’EEE

Nous faisons face à un tournant juridique majeur : la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) neutralise la règle de réciprocité prévue à l’article 2, §7 de la Convention de Berne pour les œuvres qui proviennent d’un pays extérieur à l’Espace économique européen (EEE). Cette évolution impacte directement les acteurs du design et du droit d’auteur, car elle confirme l’extension du champ d’harmonisation du droit d’auteur à l’échelle européenne. Dans les lignes qui suivent, nous exposons les points clés de ce changement, en partant de l’idée centrale pour aller vers les implications concrètes.

Contexte et bases légales

  •  La Convention de Berne et le droit de l’UE
    La Convention de Berne accordait traditionnellement la possibilité aux États signataires de refuser ou limiter la protection du droit d’auteur pour certaines œuvres provenant de pays qui n’offraient pas une protection équivalente. Toutefois, la CJUE a jugé que le dispositif d’harmonisation instauré notamment par la directive 2001/29/CE sur d’éventuelles règles de réciprocité nationales, dès lors que l’Union a exercé sa compétence en la matière.
  • Sources officielles et fondements réglementaires
    La CJUE considère que, dans le champ harmonisé du droit d’auteur, les États membres ne peuvent plus appliquer de critères basés sur la nationalité de l’auteur ou le pays d’origine de l’œuvre.

Décision-clé de la CJUE du 24 octobre 2024

CJUE, 1re ch., 24 oct. 2024, aff. C-227/23, Kwantum Nederland BV, Kwantum België BV c/ Vitra Collections AG : JurisData n° 2024-019490
Dans son arrêt du 24 octobre 2024, la CJUE a jugé que les États membres ne peuvent plus appliquer la réciprocité de l’article 2, §7 de la Convention de Berne pour refuser ou limiter la protection d’œuvres appliquées provenant de pays extérieurs à l’EEE. Seul le législateur de l’Union est habilité à fixer, le cas échéant, des exceptions ou restrictions dans les domaines entièrement régis par les directives européennes. Cette décision souligne qu’en présence de normes harmonisées, une approche nationale fondée sur l’origine des créations se trouve écartée.

Impact sur la protection des œuvres artistiques et appliquées

  •  Une protection élargie pour les œuvres de pays tiers
    En neutralisant la règle de réciprocité, la CJUE garantit aux auteurs et titulaires de droits provenant de pays hors EEE une protection alignée sur les standards de l’Union européenne, pour peu que leurs créations répondent aux critères d’originalité requis. Cela touche particulièrement les domaines du design, des modèles industriels et des arts appliqués.
  •  Renforcement de l’harmonisation
    Ce renoncement à la réciprocité conforte l’idée d’une harmonisation plus poussée du droit d’auteur, en assurant la même protection à tout créateur, indépendamment de la nationalité. Les entreprises et créateurs bénéficient ainsi d’un environnement juridique plus stable et prévisible.

Conséquences pratiques pour les titulaires de droits

  • Facilité de mise en œuvre : Les droits d’auteur peuvent être invoqués uniformément dans l’UE, sans devoir démontrer qu’un pays tiers offre une protection équivalente.
  • Opportunités d’affaires accrues : Les entreprises de l’EEE peuvent conclure plus sereinement des contrats de licence ou d’exploitation avec des titulaires étrangers.
  • Révision des contrats existants : Les accords s’appuyant sur des limites de protection liées à la réciprocité méritent une relecture afin de refléter la position de la CJUE.

Recommandations et bonnes pratiques

  • Surveiller l’évolution législative : L’Union pourrait, à l’avenir, clarifier ou introduire d’autres exceptions ou limites.
  • Auditer son portefeuille de droits : Les détenteurs de droits doivent s’assurer de l’adéquation de leurs dépôts et contrats face aux nouvelles règles.
  • Se faire accompagner : Nous conseillons un suivi juridique spécialisé, au vu de la complexité des règlementations transfrontalières.

Conclusion

La décision de la CJUE représente une avancée déterminante pour la protection du droit d’auteur dans l’Union européenne. Nous encourageons les ayants droit, les créateurs et les entreprises à adapter leurs stratégies et pratiques pour profiter pleinement de ce nouveau cadre juridique.

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Au cabinet Dreyfus, nous sommes prêts à élaborer des stratégies juridiques complètes, adaptées aux besoins spécifiques de chaque client. Nos services incluent notamment le conseil en enregistrement et défense des droits d’auteur, la protection des marques et modèles, la gestion de portefeuilles de noms de domaine, la négociation de licences et transferts, la lutte anti-contrefaçon ainsi que l’assistance contentieuse dans plusieurs juridictions.

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FAQ

1. Cette décision s’applique-t-elle à toutes les catégories d’œuvres ?

Oui. Toute œuvre protégée par le droit d’auteur au sens du droit de l’UE est concernée, y compris les œuvres utilitaires et artistiques.

2. Qu’en est-il des pays qui n’accordent aucune protection ?

L’absence de protection dans le pays d’origine n’empêche plus l’octroi d’une protection en Europe, sous réserve de l’originalité de l’œuvre.

3. La durée de protection est-elle affectée ?

Le point litigieux concerne la portée de la protection, pas sa durée. Les textes européens régissent déjà la durée de manière unifiée.

4. Peut-on encore invoquer la réciprocité à l’avenir ?

Tant que le législateur de l’UE ne réintroduit pas formellement un tel dispositif pour les arts appliqués, les États membres ne peuvent l’imposer.

5. Doit-on modifier ses contrats en cours ?

Une révision peut s’avérer nécessaire pour intégrer ces nouvelles clarifications et protéger au mieux vos droits ou obligations.

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La protection d’une invention générée par une IA par le droit des brevets

L’essor fulgurant de l’intelligence artificielle (IA) a conduit à des avancées significatives dans de nombreux domaines, y compris l’innovation technique. Désormais, des IA autonomes sont capables de générer des inventions sans intervention humaine directe. Cette réalité soulève une question centrale en droit des brevets : une invention générée par une IA peut-elle être protégée par un brevet ?

Ce sujet complexe est au cœur des préoccupations des offices de propriété intellectuelle et des législateurs du monde entier, qui s’interrogent sur la manière dont le droit des brevets doit s’adapter à cette nouvelle forme d’innovation.

 L’éligibilité au brevet des inventions générées par une IA

Les critères de brevetabilité

Conformément à l’article L611-10 du Code de la propriété intellectuelle, pour être brevetable, une invention doit répondre aux trois critères fondamentaux :

  • La nouveauté : l’invention ne doit pas avoir été divulguée au public avant le dépôt de la demande de brevet.
  • L’activité inventive : l’invention ne doit pas être une simple amélioration évidente pour un expert du domaine.
  • L’application industrielle : l’invention doit être susceptible d’être utilisée dans l’industrie.

Lorsqu’une IA génère une invention, l’évaluation de ces critères devient plus complexe. En effet, l’originalité de l’invention dépend fortement des données d’entraînement et des algorithmes utilisés par l’IA. Il devient alors difficile de déterminer si l’invention est réellement nouvelle ou si elle est simplement une reformulation d’informations existantes.

De plus, l’activité inventive suppose qu’une invention ne découle pas de manière évidente des connaissances antérieures. Or, si une IA est programmée pour analyser un vaste corpus de données techniques et proposer des solutions optimisées, peut-on considérer que son invention résulte d’un effort créatif suffisant ?

Les défis liés à la reconnaissance de l’IA en tant qu’inventeur

L’un des principaux obstacles juridiques concerne l’attribution de l’inventeur. Aujourd’hui, la plupart des législations exigent qu’un inventeur soit une personne physique.

L’Office Européen des Brevets (OEB) et l’Office Américain des Brevets et des Marques (USPTO) ont refusé des demandes de brevet où une IA était désignée comme inventeur.
À titre d’exemple, en janvier 2020, l’OEB a rejeté deux demandes de brevets européens où l’inventeur désigné était une intelligence artificielle nommée DABUS. Cette décision s’appuie sur la Convention sur le brevet européen (CBE), qui stipule que seul un être humain peut être reconnu en tant qu’inventeur.

Le demandeur, créateur de DABUS, soutenait que cette IA, basée sur des réseaux de neurones artificiels, avait conçu les inventions de manière autonome. Toutefois, l’OEB a conclu que, selon la CBE, les droits attachés au statut d’inventeur, tels que le droit d’être mentionné ou de transférer un brevet, ne peuvent être attribués qu’à des personnes physiques ou morales. Les systèmes d’IA, dépourvus de personnalité juridique, ne peuvent donc pas être reconnus comme inventeurs.

Cette affaire met en lumière les défis juridiques posés par l’intelligence artificielle dans le domaine de la propriété intellectuelle.

Ces décisions sont motivées par le fait que seuls les humains peuvent être légalement reconnus comme inventeurs, notamment pour des raisons de droits et de responsabilité.

Cette position soulève un dilemme : lorsque l’intervention humaine est minimale ou inexistante dans le processus d’invention, à qui attribuer la paternité de l’invention ?

Certains experts suggèrent d’attribuer l’inventivité à l’utilisateur de l’IA ou à l’entité qui la contrôle, mais cette approche fait encore débat.

Les évolutions législatives

Les perspectives internationales

Face aux incertitudes liées à l’IA et à la brevetabilité, plusieurs initiatives sont en cours à l’échelle mondiale :

  • L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) a lancé des consultations sur l’impact de l’IA en droit des brevets et envisage des réformes potentielles pour harmoniser les approches entre pays.
  • Les États-Unis ont vu émerger plusieurs propositions législatives visant à clarifier le statut juridique des inventions générées par IA, bien qu’aucune réforme majeure n’ait été adoptée à ce jour.

Aux États-Unis, en octobre 2023, la Maison Blanche a émis un ordre exécutif visant à encadrer le développement sécurisé et fiable de l’intelligence artificielle (IA). En réponse, l’Office américain des brevets et des marques (USPTO) a publié, en février 2024, des directives concernant la brevetabilité des inventions assistées par l’IA.

Ces directives précisent que :

  • Une IA peut contribuer à une invention, mais
  • Seul un être humain ayant apporté une contribution significative à chaque revendication peut être légalement reconnu comme inventeur.

Cette position s’aligne sur des décisions judiciaires antérieures affirmant que l’inventeur doit être une personne physique. Ainsi, les demandes de brevet impliquant l’IA doivent impérativement nommer les individus ayant contribué de manière substantielle à l’invention, excluant la possibilité de désigner l’IA elle-même comme inventeur.

Cette évolution réglementaire souligne l’importance de clarifier les rôles respectifs des humains et des systèmes d’IA dans le processus d’innovation, afin de garantir une protection juridique adéquate des inventions aux États-Unis.

Les évolutions récentes du droit des brevets

Certains pays ont amorcé des changements dans leur législation :

  • L’Afrique du Sud a été le premier pays à accorder un brevet à une invention générée par une IA, bien que cette décision demeure un cas isolé.
  • L’Australie a également examiné la question, et dans une décision du 30 juillet 2021, la Cour Fédérale a admis cette possibilité (Thaler v Commissioner of Patents [2021] FCA 879).

Ces évolutions montrent que la reconnaissance des inventions générées par une IA est un sujet en constante évolution et qu’il est probable que les régulateurs devront prochainement clarifier leur position pour répondre aux enjeux soulevés par l’IA et la propriété intellectuelle.

 Les enjeux pratiques pour les innovateurs

Stratégies pour protéger les inventions générées par l’IA

Les entreprises et les innovateurs doivent anticiper les défis juridiques en adoptant des stratégies adaptées :

  • Assurer un rôle humain dans le processus d’invention : un chercheur ou un ingénieur doit être suffisamment impliqué pour être désigné comme inventeur.
  • Documenter toutes les étapes de la création : il est essentiel de conserver des traces détaillées du fonctionnement de l’IA et de son rôle dans l’invention.
  • Explorer des alternatives à la protection par brevet : lorsque la brevetabilité est incertaine, d’autres formes de protection, comme le secret des affaires, peuvent être envisagées.

Conséquences sur la gestion des droits de propriété intellectuelle

Les entreprises doivent adapter leurs stratégies de gestion des brevets aux défis posés par l’IA. Il est notamment conseillé de :

  • Mettre à jour les contrats pour définir clairement la titularité des inventions générées par IA.
  • Surveiller les évolutions législatives pour anticiper d’éventuels changements réglementaires.

Conclusion

L’émergence de l’IA dans le domaine de l’innovation soulève de profondes questions juridiques et éthiques. Le droit des brevets, tel qu’il existe aujourd’hui, n’est pas totalement adapté à cette nouvelle réalité. Les législateurs et les offices de propriété intellectuelle doivent donc s’adapter pour répondre aux défis posés par les inventions autonomes des IA.

En attendant des clarifications réglementaires, les innovateurs doivent adopter des stratégies proactives pour protéger efficacement leurs inventions et préserver leurs droits de propriété intellectuelle.

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Révisions de la procédure de déchéance des marques pour non-usage de trois ans en Chine : Ce que vous devez savoir

Dans le domaine du droit de la propriété intellectuelle, la réglementation chinoise en matière de marques, comme stipulé à l’article 49 de la Loi sur les marques de la République populaire de Chine, impose que les marques enregistrées soient sujettes à une annulation si elles ne sont pas utilisées pendant une période continue de trois ans. Cette politique vise à empêcher l’accaparement des marques et à garantir que seules les marques effectivement exploitées restent protégées. Des développements récents indiquent des changements potentiels dans cette procédure de déchéance, signalant une évolution significative du cadre d’application des marques en Chine.

Cadre actuel de la déchéance des marques pour non-usage en Chine

Selon le cadre juridique actuel, une marque enregistrée en Chine peut être annulée si elle n’a pas été utilisée pendant trois années consécutives, conformément à l’article 49 de la Loi sur les marques. Le processus de déchéance est généralement initié par une demande formelle d’une tierce partie, souvent un concurrent ou une entité intéressée, qui saisit l’Administration nationale chinoise de la propriété intellectuelle (CNIPA) pour demander l’annulation de la marque inactive. Le titulaire de la marque doit alors fournir des preuves d’un usage réel de la marque pendant la période spécifiée afin de maintenir ses droits.

Amendements proposés à la procédure de déchéance

Les discussions récentes au sein des instances législatives chinoises suggèrent des amendements imminents à la procédure de déchéance pour non-usage. Bien que les détails spécifiques restent en délibération, les modifications proposées pourraient inclure :

  • Extension de la période de non-usage : Examen de la possibilité d’allonger la période actuelle de trois ans, offrant ainsi plus de flexibilité aux titulaires de marques avant de faire face à une éventuelle annulation.
  • Modification des exigences en matière de preuve : Réévaluation des types et des normes de preuves requises pour démontrer un usage réel, afin de simplifier le processus pour les titulaires de marques.
  • Introduction de périodes de grâce : Mise en place de périodes de grâce ou d’exceptions pour certains secteurs ou circonstances, reconnaissant que certaines industries peuvent nécessiter plus de temps avant de pouvoir exploiter leurs marques.

Implications pour les titulaires de marques

Ces changements proposés ont des implications majeures pour les titulaires de marques, qu’ils soient chinois ou internationaux :

  • Planification stratégique : Les titulaires de marques devront réévaluer leurs stratégies de gestion de portefeuille en tenant compte de la possible extension des délais de non-usage et des ajustements des exigences en matière de preuve.
  • Conformité et surveillance : Une vigilance accrue sur l’utilisation des marques et la tenue de registres complets sera essentielle pour se conformer aux nouvelles réglementations.
  • Consultation juridique : Faire appel à des experts juridiques spécialisés dans le droit des marques en Chine sera indispensable pour naviguer dans ce cadre juridique en évolution et assurer la protection continue des droits de propriété intellectuelle.

Conclusion

Alors que la Chine s’oriente vers une modification de la procédure de déchéance des marques pour non-usage de trois ans, les titulaires de marques doivent rester informés et proactifs. S’adapter à ces évolutions sera essentiel pour préserver les actifs de propriété intellectuelle sur le marché chinois en constante mutation.

Dreyfus & Associés accompagne ses clients dans toutes les étapes de la protection et de la gestion de leurs marques en Chine et à l’international. Nos services incluent la surveillance et la gestion de portefeuille de marques, la préparation et la soumission de preuves d’usage, ainsi que la défense en cas de contestation. Nous assistons également nos clients dans les procédures administratives devant la CNIPA et proposons des stratégies adaptées aux évolutions réglementaires du marché chinois. Grâce à notre expertise approfondie en propriété intellectuelle et notre réseau mondial d’avocats spécialisés, nous garantissons un accompagnement complet et personnalisé pour sécuriser et valoriser vos actifs immatériels.

Le cabinet Dreyfus et Associés est en partenariat avec un réseau mondial d’avocats spécialisés en Propriété Intellectuelle.

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FAQ

1. Quelle est la période actuelle de non-usage pour la révocation d’une marque en Chine ?

Actuellement, une marque enregistrée en Chine peut être annulée si elle n'a pas été utilisée pendant trois années consécutives conformément à l'article 49 de la Loi sur les marques.

2. Qu'est-ce qu'un "usage réel" d'une marque en Chine ?

L'usage réel désigne l'exploitation commerciale effective de la marque en lien avec les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée.

3. Comment un titulaire de marque peut-il prouver un usage réel ?

Des éléments de preuve tels que des factures de vente, des supports publicitaires et des emballages de produits affichant la marque peuvent être soumis pour démontrer un usage réel.

 

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