Est-ce que les services de vente au détail peuvent être protégés à titre de marques en classe 35 ?
Introduction
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a apporté une clarification essentielle : les services de vente au détail, lorsqu’ils sont correctement définis, peuvent être protégés en tant que services relevant de la classe 35 de la classification de Nice. Cette reconnaissance concerne non seulement la vente de produits mais également la vente de services, élargissant ainsi le champ de la protection des marques pour les entreprises opérant dans des environnements commerciaux hybrides. Comprendre le cadre juridique, les conditions d’admissibilité et les implications pratiques est indispensable pour toute société soucieuse de sécuriser sa marque.
Le cadre juridique des services de vente au détail en classe 35
Le droit des marques dans l’Union européenne était harmonisée par la directive 2008/95/CE, aujourd’hui remplacée par la directive (UE) 2015/2436. La classe 35 de la classification de Nice regroupe notamment les services de publicité, de gestion d’entreprise et de commerce de détail.
La question longtemps débattue était de savoir si l’acte de commercialiser des produits ou des services constituait en lui-même un service autonome pouvant bénéficier d’une protection par marque. La CJUE y a répondu positivement, à condition que les demandes respectent l’exigence de clarté et de précision posée par le droit de l’Union.
Les conditions d’admissibilité des services de vente au détail
Pour être acceptés en classe 35, les services de vente au détail doivent :
- Préciser les types de biens ou de services concernés (cosmétiques, vêtements, services financiers, etc.) ;
- Être présentés comme une activité distincte des produits eux-mêmes ;
- Être rédigés de façon à ce que les autorités et les concurrents puissent comprendre l’étendue de la protection revendiquée.
Cette exigence découle directement de l’arrêt IP Translator (CJUE, C-307/10), qui impose une rédaction précise et non équivoque des libellés de marques.
L’arrêt Netto Marken-Discount : portée et implications pratiques
Dans son arrêt du 10 juillet 2014 aff. C-420/13, la CJUE a confirmé que les services de vente au détail couvrent tant les produits que les services. Ces activités relèvent donc de la classe 35 dès lors que leur libellé est suffisamment précis.
Implication concrète : un enregistrement de marque peut désormais protéger aussi bien la vente physique de produits (supermarchés, boutiques de mode) que la vente de services immatériels (agences de voyages en ligne, plateformes de services financiers).
Cela renforce les moyens d’action contre les tiers qui chercheraient à exploiter une marque dans un contexte de distribution.
La frontière entre produits et services en matière de vente au détail
L’arrêt clarifie une distinction longtemps délicate. Traditionnellement, les produits relevaient des classes 1 à 34 et les services des classes 35 à 45. En reconnaissant la vente au détail de services, la CJUE prend acte de l’évolution du commerce, où les entreprises endossent souvent le rôle de producteur et de prestataire.
Exemple : un opérateur télécom commercialise des téléphones (produits) mais aussi des abonnements mobiles (services). La protection de marque doit refléter cette double réalité.
L’évolution jurisprudentielle en 2025
Depuis la décision de 2014, la pratique de l’EUIPO s’est affinée. En 2025, la jurisprudence confirme :
- Les libellés du type « services de vente au détail de préparations pharmaceutiques » sont recevables ;
- Les formulations trop larges telles que « tous services de vente au détail » sont refusées ;
- Les juridictions exigent que la preuve d’usage porte spécifiquement sur les services de vente au détail, en application de l’article 18 du RMUE.
Le Tribunal de l’UE a récemment souligné que ces services doivent présenter une valeur économique propre pour justifier leur protection.
Conseils pratiques pour les déposants de marques
Pour optimiser la protection, les entreprises devraient :
- Contacter des spécialistes de la propriété industrielle.
- Rédiger des descriptions spécifiques de services de vente au détail ;
- Préparer en amont des éléments de preuve d’usage ;
- Anticiper les divergences internationales, car certains pays (États-Unis, Chine) ne reconnaissent pas de la même manière les services de vente au détail.
Une stratégie intégrée est donc essentielle pour éviter tout angle mort dans la protection des marques.
Conclusion
La reconnaissance des services de vente au détail en classe 35 constitue un progrès majeur pour la protection des marques. L’approche de la CJUE reflète les mutations du commerce et offre aux entreprises un outil efficace pour sécuriser leurs activités, tant pour les biens que pour les services.
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Nathalie Dreyfus avec l’aide de toute l’équipe du cabinet Dreyfus.
FAQ
1. La CJUE reconnaît-elle les services de vente au détail comme protégeables en classe 35 ?
Oui, à condition qu’ils soient définis avec clarté et précision.
2. Cette protection couvre-t-elle uniquement les produits ?
Non, elle s’étend également aux services immatériels.
3. Quelles précisions doit contenir la demande ?
Elle doit spécifier les types de biens ou services concernés.
4. Que risque une formulation trop large ou vague ?
La demande peut être refusée pour manque de précision.
5. Quelle est l’importance pratique de l’arrêt Netto Marken-Discount ?
Il élargit la protection des marques aux nouvelles formes de commerce.